L’Union Européenne pourrait dater la civilisation des campaniformes (Age du Bronze en Europe) !

 

Commentant un article de la revue Nature, J.-P. Fritz journaliste de l’Obs (24 Février 2018) annonce qu’une “volonté d’une unité de l’Europe” ressort de l’examen par les archéologues de vestiges de différents sites européens et de l’étude par les généticiens d’échantillons ADN prélevés sur les ossements humains (226) associés à ces vestiges. L’étude de ces vestiges permet de les attribuer à une même ‘civilisation’ dite campaniforme (IIIè millénaire avant J.-C. en Europe), car caractérisée par les archéologues par des poteries en forme de cloches, aux décors semblables, accompagnées parfois de dagues de cuivre, boutons perforés et protège-poignets de pierre…

Voilà un nouvel exemple de la tromperie journalistique ou comment faire dire à des ‘faits scientifiques’ (ici archéologiques) ce qu’ils ne disent pas. Plus loin, le journaliste tempère un peu son propos : “une étude parue dans Nature suggère une volonté /../via la fabrication de poteries semblables”, car, peut-être, en devine-t-il la faiblesse.

L’on sait, comme le disait Bruno Latour, que les fameux ‘faits scientifiques’ ne parlent pas d’eux-mêmes (pas plus que le réel) : les scientifiques parlent pour eux après les avoir fabriqués à partir d’une théorie, grâce parfois à des instruments et avoir interprété leurs configurations sur la base de la même théorie ou d’une nouvelle qu’ils considèrent mieux adaptée (et qui peut supplanter la précédente). Ni l’ADN, ni la typologie des poteries ne parlent, seuls parlent généticiens et  archéologues à partir de la théorie générale de l’Archéologie, de la Génétique, de leurs instruments, des cas particuliers qu’ils traitent et des savoirs acquis de la discipline sur un certain espace (Europe Occidentale) et un certain temps (fin du néolithique).

L’ADN ne saurait – par elle-même – rien révéler de cette «volonté » ce que reconnaît incidemment (par le terme “suggère”) le début de cet article. La fabrication de poteries semblables permet tout juste l’hypothèse d’une même culture, au sens que les préhistoriens donnent à ce terme dérivé du terme culture, utilisé en anthropologie pour désigner un peuple/ethnie par opposition à d’autres éventuellement voisins mais exhibant des formes et décors différents. C’est tout ce que vous aurez pour caractériser une civilisation… et en dire ce qu’en suggère une archéologue suisse  me paraît une simple hypothèse aventurée parmi tant d’autres, dont celle que déclare notre journaliste.

Depuis un certain temps, après l’histoire, l’archéologie a été réquisitionnée au service de l’idéologie dominante et ses dadas : ici l’Union Européenne. Avec Toumaï, c’est la théorie de l’Evolution, avec l’homme de Cheddar c’est la couleur noire des ‘Anglais’, comme avec l’homme de Grimaldi (Monaco) considéré jadis comme ‘nègre’ (reclassé depuis).

Faute de ridicule récurent, il serait temps que nos médias révisent leur conception de La Science, héritée de ce XIXè siècle laïcard qui voulait aussi  supprimer Dieu.

 

Charles Chaleyat

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