Découvrez l’expo sur Valentin de Boulogne au Louvre (Vidéo)

Dans sa chambre à Versailles, Louis XIV avait accroché quatre tableaux du Valentin représentant les évangélistes. Le roi les avait achetés en 1670, presque quarante ans après la mort de l’artiste. Chose rare en matière de cimaise, ils sont toujours in situ – belle permanence pour un peintre très peu versaillais, à la vie courte et mal connue.

Valentin de Boulogne, « le Valentin », est né à Coulommiers en 1591. Son premier maître fut vraisemblablement son père, peintre verrier. Au début des années 1610 le Valentin part à Rome. Il ne rentrera jamais au pays. « Un jour, raconte d’Argenville, après avoir bu avec ses amis aux environs de Rome, comme il faisait fort chaud, le Valentin se baigna dans la fontaine del Babouino, qui est dans la place d’Espagne ; son sang se glaça, et peu de temps après il mourut, en 1632. »

Le Valentin meurt donc à 41 ans, trop jeune, comme le Caravage à 38 ans (en 1610). Comme lui il fréquentait plutôt le peuple : à Rome, on le vit beaucoup avec les peintres nordiques regroupés dans la confrérie remuante des Bentvueghels. Le Valentin a adopté la manière du Caravage, il est avec Ribera l’Espagnol l’un de ses continuateurs, sans être en rien un imitateur. Il fait sienne la tension qui existe chez le Caravage, sien son goût pour les éclairages violents, pour la forme bien caractérisée, sien son talent pour dépeindre aussi bien les scènes basses que les scènes sacrées ; mais il est lui-même et peu à peu évolue vers un caravagisme tempéré, à la française, dirait-on.

Ce qui frappe dans les tableaux de la période 1610-1620 est l’extrême tension des sujets et des compositions choisies par le peintre où il aime grouper les personnages (jusqu’à sept ou huit) en une composition ramassée où tous interagissent : Le Christ chassant les marchands du Temple, Le Reniement de saint Pierre. Cette tension n’est pas que mouvement, c’est immobiles que se tiennent les personnages du Christ et la femme adultère, mais quelle violence contenue alors que tous suivent le doigt du Christ qui trace des signes sur le sable.

Dans la décennie suivante, la tension diminue, mais pas l’intensité comme le prouvent son Saint Mathieu, seul avec son ange, les scènes de taverne à la fois réalistes avec leurs personnages et irréalistes puisqu’ils s’attablent parfois autour d’un massif bloc sculpté d’antiques. Ce n’est pas un reportage qu’y fait le Valentin, il peint des scènes de genre, la Diseuse de bonne aventure, le Concert, les Quatre âges de l’homme… Et il ne faut pas l’imaginer se complaire à hanter les bas-fonds : le cardinal Barberini remarque sa peinture. Il peint pour sa famille une grande machine intitulée Allégorie de l’Italie, pas franchement réussie ; et un très beau retable pour Saint-Pierre de Rome, Martyre des saints Procès et Martinien (1629-1630 ?). Avoir un retable à Saint-Pierre le met sur le même pied que deux autres peintres français : Vouet (avant 1627, tableau disparu), Poussin (Martyre de saint Erasme, 1628). Le Valentin, dans les dernières années, était donc un peintre reconnu et apprécié. Un témoignage du temps dit qu’à sa mort le prix de ses toiles quadrupla et que rapidement on n’en trouva plus une seule sur le marché…

Valentin de Boulogne. Réinventer Caravage. Jusqu’au 22 mai 2017, musée du Louvre.
Tableau en Une
Valentin de Boulogne, Réunion dans un cabaret. Vers 1625, huile sur toile, 96×133.
Département des Peintures, musée du Louvre.
© RMN-GP musée du Louvre_Martine Beck Coppola

Samuel Martin – Présent

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