Par Christian Daisug
D’horribles témoignages nous ont permis de mieux connaître les univers concentrationnaires et les techniques d’intoxication des différents régimes communistes, de la Russie de Staline à la Corée des Kim, en passant par le Vietnam d’Ho Chi Minh et de ses successeurs. Univers et techniques qui convergent vers un seul but : briser la résistance intellectuelle de l’homme afin de substituer à des convictions anciennes, destinées à être éradiquées, de nouvelles certitudes promises à un autre destin. L’opération, plus connue sous le nom de « lavage de cerveau », s’assimile à un subtil transfert de mentalité : on change les grilles de lecture de l’appareil cérébral pour que les facultés d’analyse soient amenées à emprunter des canaux préalablement définis.
L’homme est conditionné. Il ne pense plus : il répète. Il n’a plus de personnalité : il acquiert celle de ses bourreaux. Il a rejeté plus ou moins consciemment ses anciens repères : il se sent tout neuf, mais vide. Personne n’est sorti indemne de ce tricotage de matière grise. Redoutable efficacité qui est toujours en fonction dans les totalitarismes communistes, mais pas seulement.
Les manipulateurs de l’Occident en voie de globalisation ont très vite compris tout le parti qu’ils pouvaient tirer de ce système de « lavage » en série. Ils l’ont appliqué non pas aux quinquagénaires définitivement inutilisables, mais aux jeunes, plus fragiles, plus malléables. C’est ainsi que nos universités sont devenues plus ou moins des centres d’intoxication. Les Etats-Unis offrent un bon exemple de ce genre de « machinerie » qui s’étend et se sophistique. Certains appellent déjà cet univers cloisonné le Goulag mou.
La première étape de ce lavage de cerveau consiste à aider les étudiants nouvellement inscrits à se débarrasser le plus vite possible des scories accumulées pendant les « années d’éducation familiale, bourgeoise et religieuse ». Il s’agit pour ces étudiants de constater « avec lucidité » ce que ces années, en toute coupable innocence, ont pu drainer de « chauvinisme, de racisme, de sexisme, dont il convient maintenant d’expulser jusqu’au moindre germe ». « On ne construit pas l’avenir sur un terreau contaminé », insistent les consignes programmées de la Nouvelle Orientation Universitaire.
Avec la deuxième étape, commence la minutieuse édification de structures cérébrales toutes neuves. La nation américaine, qui était composée jusqu’à ces dernières décennies d’individus égaux en droit face à une destinée commune, est remplacée désormais par une mosaïque de minorités (les Noirs, les Hispaniques, les Asiatiques, les Blancs, les homosexuels, les hétérosexuels, les féministes…) avec des besoins et donc des privilèges exigeant d’être respectés au sein d’une diversité infinie d’Amériques – le pluriel devient ici obligatoire.
La troisième et dernière étape célèbre l’ethno-culturalisme en même temps que la marginalisation de l’héritage européen considéré comme « réactionnaire et aliénant », selon les principes de cette même Nouvelle Orientation Universitaire. A chaque race correspond une culture. Celle des Blancs, appelée Rape Culture (la culture du viol), n’occupe dans les amphithéâtres qu’un strapontin car on estime que, pendant plus de deux siècles, elle a sauvagement humilié toutes les autres dans un système dont le verrou a maintenant sauté. Donc, trois étapes pour vider et remplir de jeunes cerveaux. Intoxication et endoctrinement garantis. Le Blanc, qui était déjà vu comme un oppresseur chronique avant d’entrer à l’université, se voit, au moment où il en sort, comme un citoyen honteux.
L’erreur serait de croire que cet ahurissant et glacial triptyque n’entre dans la réalité que pour des scénarios exceptionnels vécus seulement par quelques milliers d’étudiants piégés par des établissements que gèrent de repérables extrémistes. L’entreprise de lessivage cérébral recouvre au contraire tout le pays, où ce sont les structures y échappant qui font exception : une brassée de campus publics et privés, le plus souvent catholiques, havres protégés du vrai savoir.
D’ailleurs, ce brainwashing, comme disent les Américains, est tellement répandu que l’on fut forcé de créer un personnage dont la fonction consiste précisément à guider le néophyte amorçant ses études dans le dédale du mécanisme dont il devient le prisonnier. Ce personnage a pris le nom d’adviser (conseiller) et doit se montrer capable de répondre à toutes sortes de questions, de réagir à un large éventail de situations et d’affirmer par exemple que « l’imbibation religieuse » (sic) explique la haine des parents pour leurs enfants homos, que « le sectarisme chrétien » (resic) explique la pariatude des étudiants musulmans sur les campus américains. Le conseiller guide ses protégés afin que leur propre identité devienne le reflet de celle de leurs pairs enrégimentés. Celui ou celle qui s’attarderait à évoluer à l’intérieur de l’opposition classique entre la droite et la gauche (allusions pro-vie, hostilité au mélange des genres ou doutes sur le réchauffement mondial) serait immédiatement catalogué comme moralement inacceptable, idéologiquement inapte ou simplement indécent.
Les bureaucrates communistes rangent ce genre de déclassés dans la catégorie des « irrécupérables » : en général, c’est une balle dans la nuque. Les universités américaines ont choisi une punition moins spectaculaire mais tout aussi radicale : l’isolement, le rejet, la mort lente. On met le mauvais sujet « au piquet ». On le « désocialise ». « Résultats garantis », assure Robert Shibley, vice-président de la Foundation for Individual Rights in Education (FIRE), une organisation qui recueille les témoignages des victimes de cet impitoyable rouleau compresseur afin de réunir, dans cette affaire, les pièces d’un procès, au sens le plus large.
Le dossier s’épaissit. A l’université de Pennsylvanie, une étudiante qui s’était inscrite à des cours de français dut ingurgiter au préalable les séquences d’un film vantant les mérites d’une socialisation de la médecine illustrée par des images de Cuba. A l’université du Delaware, un étudiant protesta lorsqu’un professeur souligna que les Blancs avaient créé l’expression « non raciste » uniquement pour se laver de toute responsabilité. A l’université de l’Indiana, une étudiante quitta brusquement la salle – attitude passible d’un « lynchage » – lorsque le professeur lui demanda à quel âge elle avait découvert son identité sexuelle. A l’université de Géorgie, un étudiant, sournoisement étiqueté comme républicain, fut immédiatement exclu pour avoir critiqué un projet de parking géant coûtant 30 millions de dollars. Les professeurs de gauche n’ont plus besoin de mettre en place les ressorts d’une propagande : il n’y a plus de débat. Et les élèves n’ont plus besoin de faire appel à leur intelligence : il s’agit de retenir sans même comprendre.
Beaucoup de parents acceptent d’énormes sacrifices afin de financer ce ruineux chaos (23 000 dollars par an en moyenne pour le public, 45 000 pour le privé) sans se douter qu’ils poussent leur progéniture vers des programmes qui relèvent davantage du camp soviétique de base que d’une éducation de haut niveau. Aux olympiades des « têtes bien faites » qui rassemblent le gratin mondial des étudiants, les Etats-Unis s’efforcent à chaque fois d’échapper à l’humiliation de la lanterne rouge. Rien d’étonnant lorsque l’on transforme les jeunes en « agents d’une mutation sociale » au lieu de leur apprendre à réfléchir. Dans les livres que certains daignent feuilleter, la guerre d’Indépendance, ainsi que les deux conflits mondiaux, sont mentionnés en quelques lignes qui ne fournissent aucune explication substantielle sur leurs origines, leur déroulement ou leur conclusion. On ne retient de la guerre de Sécession que le destin des Noirs et de la guerre du Vietnam que les protestations pacifistes. Même un bon propagandiste stalinien ne serait pas allé aussi loin dans la désinformation.
Quant à la littérature, elle ne devient utile que si elle sert de prétexte à une « étude » des problèmes de race, de sexe ou de classe. Les collections d’œuvres classiques ne servent plus qu’à décorer d’immenses bibliothèques subversives. Jusqu’en 1985, l’université Stanford, en Californie, fut considérée comme l’une des plus prestigieuses du pays. Il a suffi d’un président « gourou d’un pluralisme constructif », de quelques leaders étudiants radicaux et d’une offensive hystérique contre les valeurs occidentales pour la transformer en enclave tiers-mondiste.