Par Caroline Parmentier
Il n’est pas besoin d’être un fan de l’univers de Disney (mais le plaisir est double si on l’est !) pour apprécier ce joli film, tout public, très américain, qui fait du bien. Si l’histoire est chargée en émotion, le duo Emma Thompson-Tom Hanks est tout à fait amusant. Emma Thompson est même carrément bluffante, comme souvent.
John Lee Hancock nous raconte la genèse de Mary Poppins. Elle est beaucoup plus sombre que ne le laisse supposer le résultat sautillant et chantant. Lorsque les filles de Walt Disney le supplient d’adapter au cinéma leur livre préféré, celui-ci leur fait une promesse… qu’il mettra vingt ans à tenir ! Car pour obtenir les droits d’adaptation du roman, le grand Walt se heurte à un phénomène : l’auteur. Pamela Lyndon Travers, vieille fille psychorigide, misanthrope et têtue, qui n’a aucunement l’intention de laisser son héroïne bien-aimée se faire malmener par la machine hollywoodienne.
Ce sont ces deux semaines de duel intense de 1961 que nous suivons avec un intérêt soutenu qui nous surprend nous-mêmes. En même temps que l’on découvre par flash-backs l’enfance pour le moins dramatique de la créatrice de la super-nanny la plus célèbre du monde. A l’ombre d’un père adoré, rêveur, extravagant et gravement alcoolique.
Armé de ses story-boards bourrés d’imagination et des chansons pleines d’entrain composées par les talentueux frères Sherman, le père de Mickey jette toutes ses forces dans l’offensive, mais l’ombrageuse dure à cuire ne cède pas. Comme en témoignent les enregistrements authentiques qu’on peut entendre dans le générique de fin, elle rendait fous les frères Sherman qui l’avaient surnommée « la sorcière ». Impuissant, Walt Disney voit le projet lui échapper. Jusqu’à ce qu’en véritable magicien de la psychologie, il mette le doigt sur le trauma et les fantômes qui hantent l’enfance de Pamela. Si le film voit alors l’héroïne s’adoucir et se bonifier (on est dans une production Disney) il n’en fut pas exactement de même pour la Pamela d’origine.
Egale à elle-même celle-ci sort de la première de Mary Poppins à Hollywood en août 1964, en disant à Walt Disney qu’« il y a encore du boulot ». « Les amarres du navire sont larguées », lui répondra alors le maître