On ne présente plus Régis Wargnier. Le réalisateur, touche-à-tout, excelle particulièrement dans la fresque à caractère historique. C’est encore ce qu’il a exploré avec brio (après Indochine en 1991 ou Est-Ouest en 1999) dans Le Temps des aveux.
Cambodge, 1971. François Bizot jeune ethnologue français arpente le pays pour comprendre la mystérieuse et fascinante culture du peuple khmer. Il est rapidement capturé par les rebelles – les Khmers rouges qui veulent « libérer le peuple » – et accusé d’être un espion de la CIA. Le film retranscrit avec une grande justesse l’expérience qu’a véritablement vécue François Bizot, et qu’il relate d’ailleurs dans son livre Le Portail (2000).
Le film se concentre sur l’équivocité de la relation qui s’installe entre François Bizot (magnifiquement interprété par Raphaël Personnaz) et son bourreau, Dutch « monstre au caractère doux », qui dirige le camp et procède à ses interrogatoires. Dutch, alors jeune et pétri d’idéaux maoïstes, doute de la culpabilité de ce prisonnier qui clame son innocence, haut et fort. Il n’est qu’un maillon de la chaîne, ne fait qu’exécuter les ordres venus d’en haut – on pense évidemment à Hannah Arendt et sa réflexion sur le libre-arbitre et la notion de crime contre l’humanité dans son magistral Eichmann à Jérusalem.
Le retournement des esprits, particulièrement des femmes et des très jeunes enfants, levier de la politique maoïste, les atrocités commises par les Khmers, sont fortement soulignés dans le film ; tout comme le ridicule et le déni de réalité des universitaires français en poste, qui encensent un régime idéal, qui n’existe que dans leur imagination.
Foncez voir ce film, juste, dérangeant et touchant.
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