Rare représentant du cinéma made in Corse, Thierry de Peretti, 46 ans, dresse le portrait de sa génération, “meurtrie” par la lutte armée et les guerres fratricides dans son film “Une vie violente”, présenté à Cannes.
Y est décrit pendant 01H47 Stéphane, un jeune Bastiais séduit par le nationalisme. Sous couvert de film de mafia et de gangsters, ce long-métrage, montré à la section parallèle de la Semaine de la critique, interroge les fins et les moyens du combat politique, dans les années 1990.
Autant de questions qui résonnent aujourd’hui : le Front de Libération nationale Corse (FLNC) a abandonné la lutte armée en 2014, les nationalistes sont arrivés au pouvoir par les urnes, l’année suivante. Mais la fièvre décrite dans le film n’est pas retombée dans une partie de la jeunesse nationaliste, et l’île connaît toujours des accès de tension et de violence.
Le réalisateur, dont le premier long-métrage “Les Apaches” (2013) se déroulait déjà en Corse, s’est librement inspiré de l’histoire de l’une de ses connaissances d’enfance, Nicolas Montigny, jeune nationaliste tué de onze balles de pistolet automatique, en 2001, après avoir été proche du groupe clandestin “Armata Corsa”.
Dans le film, incarcéré après avoir accepté de transporter des armes pour des connaissances, le jeune homme se lance dans l’action clandestine pour la libération du peuple corse. Avec la ferme intention de ne pas se salir les mains, sur une île où la lutte armée s’est abîmée dans les dérives mafieuses, le sectarisme et les guerres intestines.
“La Corse, c’est comme une partie de cartes où tout le monde triche. Nous, on prend la table et on la renverse !”, lancent ces jeunes militants.
Las, les logiques de vengeance et de contrôle du territoire les rattraperont : il faut se frotter au banditisme pour récupérer des armes et financer la lutte, sans compter l’hostilité des clans déjà établis. Dès la première scène, le spectateur comprend que leur combat se terminera dans le sang.
Les personnages marchent vers leur destin, sous le regard de mères qui se sont résolues, depuis des générations, à voir leurs fils mourir sous les balles, et de soeurs et de petites amies qui préfèrent fermer les yeux.
Les acteurs, dont Stéphane (Jean Michelangeli) sont pour une bonne part des novices, recrutés localement et parfois eux-même touchés par les évènements de cette époque.