Patrick Buisson aurait commis un crime odieux, à la radio, il y a quelques semaines. Un crime de lèse-république ! Il a osé, en effet, déclarer que la Révolution française, à travers la Terreur, était la matrice de tous les terrorismes. Indignation ! Stupeur des bien-pensants ! Mais Buisson, qui vient de sortir chez Perrin un ouvrage consacré aux guerres de Vendée, sait de quoi il parle.
En Vendée, c’est un peuple de civils qui est exterminé en 1794, alors que le gros de l’Armée catholique a été anéanti ou dispersé. Or ces massacres, loin d’être un excès de soldatesque, sont décidés en haut lieu. A Paris. Là règne la Convention, dominée par un exécutif puissant et cornaqué par les Jacobins. C’est le Comité de salut public, où s’affairent, principalement entre 1793 et 1794, des députés montagnards aux noms sinistres : Barère, Saint-Just, Billaud-Varenne, Couthon, Collot d’Herbois entre autres. Sans oublier, bien sûr, la statue du commandeur, la silhouette de l’Incorruptible : Robespierre.
Mais qui donc furent ces artisans de la Terreur ? Quels furent leurs parcours, leur doctrine, leurs agissements ? C’est, en somme, les questions que se sont posées Jean-Joël Brégeon et Gérard Guicheteau, dans un stimulant ouvrage paru cet automne aux éditions du Rocher : Les Tyrannosaures de la République.
Titre énigmatique, certes, mais qui rend bien compte de la voracité de cette Terreur mangeuse d’hommes et qui, d’ailleurs, fera s’entre-tuer bon nombre de révolutionnaires.
Extermination d’une race rebelle
L’originalité de l’ouvrage ? Il dresse un vaste panorama des différentes catégories de protagonistes de la Terreur. On y croise une foule de personnages, et d’abord des idéologues. Au-delà de l’incontournable Robespierre, l’ouvrage fait mieux connaître au lecteur la figure de Barère, véritable porte-voix du gouvernement terroriste. Il faut relire ses discours vengeurs appelant à l’extermination de la « race rebelle de brigands » de la Vendée, « chancre qui dévore le cœur de la République ». Il faut, aussi, se plonger dans son rapport du 8 pluviôse an II, d’une rare violence à l’encontre des langues régionales, associées à l’obscurantisme le plus abject. Une idéologie jacobine qui a fait des petits.
Mais les « tyrannosaures », ce sont aussi des bouchers : Fouché à Lyon (brutalement assiégée et rebaptisée « Ville affranchie ») et Carrier à Nantes, auquel les auteurs ont consacré de nombreux travaux. Et puis il y a les petits, les méconnus, les oubliés, « apôtres » ou exécutants. Tous furent les aiguillons ou les instruments consentants et zélés des basses œuvres d’une République jacobine dont le projet, matrice des totalitarismes modernes, fut la régénération anthropologique et la conception d’un homme nouveau.
- Jean-Joël Brégeon et Gérard Guicheteau, Les Tyrannosaures de la République, éd. du Rocher, 194 pages.