On sait les polémiques suscitées par la traite négrière et par la responsabilité des Européens et des Euro-américains dans l’esclavage et le commerce des esclaves. Randy J. Sparks élargit ce débat en revenant sur le terrain de façon dérangeante : au lieu de choisir les grands ports occidentaux du commerce triangulaire comme Liverpool, Nantes ou Middleburg, son attention s’est portée sur l’Afrique quand la traite atteint son zénith.
Voici l’histoire du port d’Annamaboe, plaque tournante de la Côte-de-l’Or. Sans jamais perdre de vue la place de la traite dans l’économie-monde des échanges transatlantiques l’auteur fait revivre, avec d’étonnantes archives, ce que vécurent concrètement les hommes et les femmes de ce port où s’entrecroisent Anglais, Français, Danois…
Tous contraints de négocier avec les grandes familles africaines qui jouent à merveille des uns et des autres. L’action se déroule aussi à Londres, à Paris et aux Amériques.
Randy J. Sparks est également un conteur. On en jugera par les portraits croisés du fante ” Corrantee “, chef commercial et politique de la ville, et de Brew, son interlocuteur anglais, principal négociant de la place, toujours furieux de devoir transiger voire s’incliner ” là où les Nègres sont maîtres “. On suivra également avec émotion le destin ou les fragments de destins que fait renaître une remarquable documentation. Annamaboe est au coeur d’une première mondialisation. C’est aussi le lieu d’une réalité violente qui nous parle aussi bien de la Côte-de-l’Or que de l’Europe. Comme l’ont remarqué les critiques américains, cette plongée novatrice dans la réalité d’un port esclavagiste africain, est paradoxalement ” une nouvelle manière de décrire la naissance de l’Amérique “