Euthanasie: de la loi aux dérives…

Que se passe t-il donc en Belgique – dans le monde feutré des hôpitaux où rôde en toute légalité la pratique de l’euthanasie – pour que les médias évoquent l’éventualité d’une reconsidération de la loi qui l’autorise ? Que la Belgique ait légiféré et autorisé l’euthanasie active depuis le 28 mai 2002 ne signifie pas que tout se passait pour le mieux (si l’on peut dire) en ce domaine. Bien au contraire. Les scandales n’ont cessé d’émailler ces quatorze années de pratique. Il faut dire que les législateurs belges, dans leur « générosité humaniste », ont ouvert ce « service » à un large public. Tous les patients peuvent y prétendre : les vieux, les jeunes, même les enfants. Et toutes les pathologies, même les profondes déprimes ! Un film belge rend compte du criant décalage entre les cadres de la loi autorisant l’euthanasie et les dérives épouvantables de sa pratique. Ce film a été écarté de tous les médias, mais on peut le trouver en ligne.

Il montre toute l’horreur d’une médecine dévolue aux soins autant qu’à la mort sur ordonnance. Des témoignages viennent du public, mais les plus sidérants émanent du sérail hospitalier où l’euthanasie se réalise : « Une euthanasie sur deux est réalisée sans le consentement explicite du patient », « On est tous des assassins selon la loi », disent des médecins qui la pratiquent. Le témoignage des infirmières est particulièrement saisissant : « J’ai vu des patients sur lesquels on a pratiqué le meurtre ; j’aurais pu résoudre leur problème en trois ou quatre heures et ils auraient pu rentrer chez eux. Comme beaucoup d’infirmières de mon âge, je me demande où j’irai me faire soigner quand j’en aurai besoin parce que je n’ai plus confiance dans le système ni dans les soignants… »

C’est l’euthanasie pratiquée il y a cinq ans sur une jeune femme de 38 ans, alors qu’elle était en proie à une profonde dépression consécutive à une rupture, qui a fait surgir le malaise sur la scène politique et médiatique. Telle une goutte d’eau qui fait déborder le vase. Selon les proches de cette jeune femme, le médecin chargé de pratiquer l’euthanasie aurait comparé son acte à « une injection létale administrée à un animal favori pour mettre fin à ses souffrances ».

C’est une déclaration significative, caractéristique de l’air du temps. Une loi qui donne à des médecins le pouvoir de donner la mort leur présuppose (dans le meilleur des cas) un savoir médical et une probité sans faille, un humanisme et un tact à toute épreuve. Or, l’Histoire au long cours et la réalité de tous les jours nous enseignent qu’en ces domaines, l’être humain est éminemment faillible, y compris les médecins. « Qui veut faire l’ange fait la bête », disait Blaise Pascal. Nous sommes dans le vif du sujet. La revalorisation de l’euthanasie, de l’eugénisme, le déni des différences culturelles, le nivellement des valeurs témoignent d’un matérialisme cynique et vénal fondé sur une conception biologique de l’homme. Une conception de l’homme que l’on peut qualifier de « bouchère », qui marque le dévoiement de la joyeuse épopée libérale-libertaire vers un terminus de type dictatorial et sacrificiel.

Comme l’interdit et les renonciations pulsionnelles qu’il exige sont au principe de la civilisation, nous allons vérifier a contrario que l’impératif de jouissance soixante-huitard, maître mot et paradigme qui sous-tend le totalitarisme marchand et financier, nous ramène à la désymbolisation de l’homme, à son sacrifice, à la barbarie.

Véronique Hervouët – Boulevard Voltaire

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