L’esprit du 11 février!

Cela ne pouvait pas durer éternellement, hein ? En février, si l’on en croit le baromètre mensuel Ipsos, les cotes de popularité du chef de l’État et de son Premier ministre piquent à nouveau terriblement du nez (respectivement -8 et -7 points).

À force de s’identifier à « l’esprit du 11 janvier », ils se croyaient aériens, en lévitation, intouchables. Ils retombent lourdement sur Terre : fin du rêve, retour prosaïque à la réalité.
La vérité est que, durant quelques jours, les Français ont été avec François Hollande comme les enfants d’une mère indigne, écervelée, les laissant tous les soirs enfermés dans l’appart’ avec les devoirs pas faits, la fenêtre à l’étage entrebâillée, les médicaments à portée, la conduite de gaz pas seulement fermée, pour aller danser en boîte jusqu’au bout de la nuit. Lorsque celle-ci, pour une fois, retrouvant la tête froide à l’occasion d’un triste événement, leur prépare un semblant de dîner, s’inquiète de savoir depuis combien de temps ils n’ont pas pris un bain, bref, se comporte enfin comme une mère ordinaire, ses petits lui en sont incroyablement reconnaissants, l’embrassent, la serrent dans leurs bras comme si elle était merveilleuse. C’est qu’ils n’ont pas le choix, n’ont pas d’autre mère et doivent faire avec, comme les Français doivent faire avec Hollande jusqu’en 2017.
Airs graves, discours fermes, manifestation de portée internationale… les Français, fragilisés et apeurés, ont cru un instant pouvoir se réfugier dans le veston d’un vrai président. Sauf que de la même manière que la mère évaporée ne peut sans cesse faire du chantage affectif, écraser une larme en rappelant à ses enfants la délicieuse quiche surgelée qu’elle leur avait servie ce fameux soir, et s’en servir d’alibi pour continuer à aller courir gaiement le guilledou en ne descendant même pas la poubelle au passage, le Président ne peut éternellement évoquer l’esprit du 11 janvier. Parce qu’au fond, rien n’a changé : les portes battantes du pays sont toujours là, ouvertes à tous vents et surtout à tous terroristes, les bonnes idées du ministre de la Justice sont toujours là, détricotant dans un sens ce que les forces de l’ordre s’évertuent péniblement à tricoter dans l’autre, les 5 millions de chômeurs sont toujours là, et reviennent même au premier plan, à présent que la crainte de la mort est moins prégnante. Mais Vigipirate, qui rassure le bon peuple, ne sera, lui, pas toujours là, ou plutôt « Vigi » partira et « pirate » restera. Car les soldats en patrouille s’essouffleront – c’est arithmétique – avant les terroristes.
Il paraît que tous ceux qui pratiquent le spiritisme savent cela : le problème est qu’à ce petit jeu-là, on peut aussi bien faire de bonnes rencontres que de mauvaises. On dirait que l’esprit du 11 février est bien moins gentil que celui du 11 janvier… mais sans doute bien moins méchant que celui du 11 mars, du 11 avril, et tutti quanti. Et que les Français ont bien moins envie de faire tourner les tables que de les retourner brutalement pour redistribuer les cartes.

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