À Lisbonne, les 18 et 19 octobre 2007, le sommet des chefs d’État et de gouvernements de l’Union européenne a formalisé l’accord des 27 sur le nouveau traité européen. Ce traité de Lisbonne a réhabilité, sous un autre nom, le projet de Constitution européenne rejeté par les peuples français et néerlandais aux référendums de 2005.
Tout ce que les Français ont refusé incruste le nouveau traité : la supériorité absolue du droit européen sur la Constitution française ; la personnalité juridique de l’Union qui permettra à la Commission de se substituer aux États sur la scène internationale ; un président désigné par ses pairs pour deux ans et demi ; un ministre européen des Affaires étrangères baptisé autrement ; aucune limitation géographique et civilisationnelle (à l’inverse du traité de Nice qui fixait la liste des pays pouvant devenir membres de l’UE), ce qui laisse grande ouverte la porte à l’entrée de la Turquie ; le plus important transfert de compétences de l’histoire de la construction européenne (68 nouvelles matières seront décidées à la majorité qualifiée)… Ce traité « simplifié » et « modificateur » est une usine à gaz de 250 pages d’amendements à insérer dans les 3 000 pages des traités précédents.
Nicolas Sarkozy a annoncé que la France serait « la première » à ratifier le traité, avant Noël, au lendemain de sa signature définitive le 13 décembre prochain. Avant la ratification, il faudra réunir le Parlement en Congrès pour réviser la Constitution française, incompatible avec le traité de Lisbonne. Des 27 pays de l’UE, seule l’Irlande, par obligation constitutionnelle, a prévu d’organiser un référendum.
En juin dernier, le Premier ministre luxembourgeois, Jean-Claude Juncker, confiait : « La substance du traité constitutionnel a été préservée (..) bien entendu, il y aura des transferts de souveraineté.
Mais serais-je intelligent d’attirer l’attention du public sur ce fait ? ». Selon un sondage Louis Harris publié jeudi par le « Financial Times », 76 % des Allemands, 75 % des Britanniques, 72 % des Italiens, 65 % des Espagnols et 63 % des Français souhaitent un référendum.
Les responsables européens préfèrent satisfaire les milieux d’affaires. Exemple : ceux-ci veulent l’intégration de la Turquie, qui la fera bénéficier des « fonds structurels » européens pour stabiliser son inflation, moderniser ses infrastructures et amplifier sa demande solvable ; ils pourront alors y investir en toute sécurité. Les conséquences identitaires, ils s’en moquent…