C’est une question prisée par les lecteurs compulsifs et les bibliophiles non repentis : « Si votre bibliothèque venait à brûler, quels ouvrages sauveriez-vous en priorité ? » Posée autrement, elle devient : « Quels sont les trois livres que vous emporteriez sur une île déserte ? » Cette simple question, François Armanet l’a posée à plusieurs dizaines d’écrivains, venant des quatre coins du monde. Les réponses sont tantôt convenues, tantôt insolites. Certains répondent en longueur et prennent le ton sérieux de l’université, d’autres en profitent pour prouver leur talent de conteur en mettant en scène les trois titres retenus. Le lecteur est frappé par le nombre de citations dont fait l’objet la Bible, de la part de poètes ou romanciers pourtant peu connus pour leur tempérament d’enfant de chœur. A tel point que François Armanet demandera au fil des années à ses « interviewés » d’exclure les Saintes Ecritures de leur liste.
La plupart des écrivains sollicités font partie des « gros vendeurs » de la littérature mondiale, tête de listes dans les Fnac, supermarchés du livre et halls de gare. Mais les plus non conformistes d’entre eux nous offrent de belles pépites, ainsi Michel Déon qui déclare : « Même si c’est en vain, la Constitution devrait exiger que, dès le berceau, les petits Français apprennent par cœur une page de Rabelais. Ce serait leur baptême… » et l’explosif Edouard Limonov tranchant : « Je suis illettré. Je prendrais pas de livre (sic), mais un cahier pour écrire. » Saluons l’idée originale d’un tel recueil, en attendant qu’une déclinaison en soit faite sur des rivages moins conventionnels. Paucard, Raspail, Millet, Favrit et vous Bergeron, Tesson, Maulin, quels livres sauveriez-vous du désastre qui vient ?
Bibliothèque idéale du naufragé par François Armanet, éditions Flammarion, 204 pages, 16 euros.