9 novembre 1970 / Décès du général De Gaulle

« Ils sont venus parce que c’était lui. Ils sont venus parce qu’ils avaient raté l’enterrement de Churchill, qu’ils n’avaient pu se rendre aux obsèques de Staline, que c’était le dernier géant de la Seconde Guerre mondiale. Le dernier géant tout court ; ils le sentaient confusément ». Nous sommes le 12 novembre 1970 dans la cathédrale Notre-Dame de Paris où sont réunis tous les officiels étrangers et les rares personnalités françaises autorisées. C’est par cette belle phrase qu’Éric Zemmour, dans son dernier ouvrage Le Suicide français, décrit l’hommage rendu par les autres nations au grand homme, décédé trois jours plus tôt, ce 9 novembre.

De Gaulle. On a tout dit ou presque sur ce personnage hors du commun. On connaît moins son œuvre littéraire, car c’est un écrivain de talent : pas moins d’une quinzaine d’ouvrages et de magnifiques Mémoires de guerre en trois volumes (de 1940 à 1946), sans compter les lettres, notes et carnets divers. On sait moins que Charles de Gaulle fit partie des lauréats potentiels du prix Nobel de littérature en 1963. Or, le prix fut décerné à un écrivain qui lui ressemblait à bien des égards : le poète grec Georges Séféris.

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Qu’y avait-il donc de commun entre ces deux hommes ? Comme de Gaulle, et bien qu’un peu plus jeune que lui, Séféris était né à Smyrne avant la guerre de 1914, dans ce qui était encore l’Empire ottoman, dans l’ancien monde dirait-on. Comme lui, il s’exila avec le gouvernement grec libre pour échapper à l’occupation allemande (1941), en Crète d’abord, puis en Égypte. Comme lui, il fut un combattant et servit sous les drapeaux. Comme lui, surtout, il fut amoureux de son pays, aimant l’histoire, la mythologie et la tragédie grecques, et s’efforçant d’écrire dans la langue populaire pour mieux communier avec l’âme de son peuple. Et tous les deux sont morts à un an d’intervalle.

Bien sûr, la comparaison s’arrête là. Mais ce que l’on veut dire, c’est que les hommes de cette génération ont d’abord aimé leur histoire et leur culture, n’ont pas rougi de leurs origines ni de leur identité, et ont ainsi pu mieux comprendre le monde dans lequel ils vivaient. S’il y a un message à retenir du général de Gaulle en ce jour de recueillement, c’est bien celui de ne jamais renier notre héritage historique, et de tout faire pour sauvegarder la souveraineté nationale, contre vents et marées, laquelle est aujourd’hui en danger. C’est le sens historique qui manque chez la plupart de nos politiques et explique cette absence de vision dans la conduite de leur action. Ils marchent comme des funambules.

Lu sur Boulevard Voltaire

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