Lorsqu’on lui demande quelle raison a pu le pousser, lui, le général Didier Tauzin, en retraite depuis dix ans, de tenter une aventure aussi risquée que la présidentielle, il répond par la parabole des talents. « Je sais commander, assure-t-il, je suis bon pour ça, j’ai été formé pour ça ». Or, à ses yeux, la France en a un besoin urgent, immédiat, et elle ne s’est pas dotée de l’homme idoine… « Hollande est patron comme je suis danseuse étoile », ironise-t-il. Et pour ceux qui en douteraient, ce militaire au visage carré, qui a passé 36 ans sous les drapeaux, réalisé vingts opérations – le plus souvent des « opérations spéciales »– n’est pas franchement taillé pour le tutu et les ballerines.
Que des coups à prendre
Le général de division (trois étoiles) est bien conscient de la difficulté de la bataille qui s’annonce. Inconnu parmi les bataillons d’hommes politiques de carrière, il n’a pas les bonnes cartes en main : difficile d’imaginer un militaire devenir président en un an. Il a peu de chance de réussir, mais ça ne l’empêche pas de dormir : « Je fais ce qui me semble être juste et je m’en remets à la providence, si je ne suis pas élu, j’ai des radis magnifiques qui poussent dans mon potager… »
Un moment critique
Il est convaincu que la France vit un moment critique de son histoire. Les vingts prochaines années seront décisives, elles marqueront la transition entre deux époques civilisationnelles, et le général fait le pari que le pays retrouvera ses sources. La France est ontologiquement catholique, dit-il, en citant les paroles de Camel Bechikh, le musulman patriote français de l’association Fils de France. Pourtant, la période est risquée, outre le problème de la chute démographique, il n’exclut pas la possibilité d’une guerre civile, un sujet qu’il connaît bien pour avoir été déployé – entre autres lieux – au Rwanda.
La France doit retrouver sa souveraineté pour agir
Or face aux défis qui s’annoncent, la France a besoin de retrouver sa souveraineté et d’agir comme acteur responsable. « Nous n’avons plus de politique internationale indépendante », déplore Didier Tauzin, qui entend se détacher de l’OTAN pour retrouver le rayonnement international français. En Afrique en particulier : Il est encore temps de développer le continent africain, nous le pouvons, Français et Africains ensemble, nous en avons les moyens. Or notre position actuelle de vassal des États-Unis nous prive de ces opportunités. Plus grave, l’histoire prouve que lorsqu’un état suzerain est en difficulté, il abandonne ses vassaux, et que leur sort n’est alors pas enviable. Or, à ses yeux, le monde entre dans une période de troubles, notamment liés aux déséquilibres démographiques entre les pays du Nord et ceux du Sud.
Redevenir le moteur de l’Europe
Bien qu’il dénonce les dérives de l’Union européenne actuelle, le militaire et candidat n’imagine pas l’avenir de la France sans l’Europe. La France a, au contraire, selon lui, la vocation à redevenir le moteur de l’Europe, et à retrouver des alliés, notamment auprès de la Russie, avec laquelle elle a des intérêts communs.
« Qu’il aime la France à en mourir »
Pour expliquer sa vocation d’officier, autrement dit de serviteur du pays, le général remonte dans sa mémoire jusqu’en 1954. Didier Tauzin avait 4 ans lorsqu’il a vu sa mère pleurer à la lecture d’une lettre. Son père écrivait qu’il allait sauter sur Dien Bien Phu, et qu’il ne reviendrait pas. Il est en fin de compte revenu, après une atroce captivité chez les Vietnamiens, mais la conclusion de sa lettre est restée gravée dans la mémoire du jeune garçon : « Fais de notre fils un officier, qu’il aime la France à en mourir ».