Catherine Dorval, médiéviste respectée, spécialiste du linceul de Turin, parcourt le monde pour des conférences qui font salle pleine. Elle y explique et y démontre l’authenticité de la sainte relique. En carbonisant au passage les sectateurs du carbone 14. Lectio et disputatio… Le problème c’est que, partout où elle est invitée, de Copenhague à Venise en passant par Paris, Istanbul, Budapest, les cadavres se multiplient. Elle-même est physiquement menacée. Mais aussi ses proches, ses enfants, sa belle-mère, un prêtre de ses amis, le père Queyras. A Copenhague, elle échappera de justesse à la mort, comme protégée in extremis par un « ange gardien ».
Avec une précision historique impeccable et un art consommé du suspens, Erick George-Egret nous entraîne dans un tourbillon. De Jérusalem en l’an 33 à Paris de nos jours avec de nombreuses « escales » : l’Anatolie en 1187, Venise dans l’été 1202, Constantinople en 1204, le château de Ray-sur-Saône en 1234, Nouaillé-Maupertuis en 1356, Lirey en 1389 et en 1418, Genève en 1453, Chambéry en 1532, Turin en 1997, le Liban, Israël, etc.
La jeune femme va vite acquérir une certitude : une machination mortelle – et très ancienne – a été ourdie contre le linceul de Turin. Pour en retrouver l’origine, il faut remonter à Saladin, qui aurait donné mission à de véritables commandos – les voyageurs noirs – de détruire le linceul du Christ. Plusieurs tentatives au cours des siècles, toutes miraculeusement déjouées. Jusque-là…
De nos jours, surfant sur Al-Qaïda, Daesh et les sectes islamistes, les voyageurs noirs sont de nouveau opérationnels. A la différence des sceptiques et des chantres du carbone 14, cela fait huit siècles qu’ils n’ont aucun doute, eux, quant à l’authenticité du Sydoine, cette relique dont Saladin avait prédit qu’elle pourrait être l’arme absolue de la chrétienté : « Une arme telle que la religion de Mahomet pourrait un jour en trembler… voire en mourir. Elle devait disparaître aux yeux des chrétiens ! A tout jamais. Les voyageurs noirs avaient été créés pour cela. »
La force de persuasion de ce thriller est telle, si intelligemment ancrée sur les réalités de notre époque et la guerre religieuse qui nous est faite, qu’on en oublie qu’il s’agit d’un roman. Un roman ? Sauf que…
Sauf que tout est plausible. A quoi s’ajoute, comme une histoire dans l’histoire, le long et miraculeux voyage du suaire jusque dans son havre de la cathédrale Saint-Jean-Baptiste de Turin. Jusqu’à ce coup de théâtre – mais ne comptez pas sur moi pour en dévoiler les arcanes, bien sûr – qui va faire la une des médias : « On a volé le linceul ! »
Un vol très opportun : il vient contrecarrer le plan de trois voyageurs noirs, Farouk, Saad et Othman. Six charges d’explosif qui, habilement disposées, sont destinées à transformer la cathédrale du suaire en chaleur et lumière…
A partir de là, déjà ciblée par les voyageurs noirs qui vont kidnapper ses enfants – « Remettez-nous le linceul, on vous rend vos gosses » – Catherine devient une proie traquée. La capturer, récupérer le linceul dont elle se serait emparée et l’abattre…
« Précision historique et suspens haletant s’entremêlent au rythme des événements de 1187 à nos jours », indique l’accroche éditoriale de ce livre. Et c’est encore ne rien dire !
Editions du Rocher.
Alain Sanders – Présent