Une récente enquête montre que pour la première fois depuis 2008, les achats des Français en supermarché ont diminué de 0,2 %. Qu’est ce qui peut bien expliquer ce recul des ventes ?
D’abord il semblerait que les Français cherchent à privilégier leur équilibre alimentaire, d’où un rejet des aliments superflus (baisse par exemple des ventes de sucre et de boissons sucrées). Mais ils sont également de plus en plus nombreux à penser qu’il vaut mieux consommer moins pour consommer mieux. De nombreuses campagnes sanitaires et la transparence de plus en plus grande de l’information sur le secteur agro-alimentaire ont entraîné les Français à consommer des produits plus chers mais de meilleure qualité.
Ensuite la consommation évolue avec les mœurs et la société, bien au delà de la volonté de favoriser une alimentation saine et équilibrée. La conscience des consommateurs, orientée par les médias qui jettent de plus en plus souvent un éclairage sur les dérives de l’industrie et ses menaces environnementales, les pousse à revoir leurs habitudes alimentaires. Les reportages sur l’huile de palme ou sur les conditions d’abattage des animaux lèvent petit à petit le voile sur le coût humain de la consommation de masse. Si les vegans et les végétariens se multiplient jusqu’à bientôt devenir à leur tour des lobbys, l’évolution du choix de l’alimentation, mais aussi le développement de nouvelles allergies ont réellement transformé les routines alimentaires. Avec une baisse des ventes de 8 %, le lait est particulièrement touché par ces évolutions, aux dépens des agriculteurs.
La remise en cause des supermarchés ne semble pas forcement liée à une baisse du pouvoir d’achat, bien que faire ses courses en grande surface soit de moins en moins avantageux puisqu’on y achète plus de choses à des prix pas toujours plus bas. Les périphéries des villes vouées aux grandes surfaces et grandes enseignes souvent mondialisées dépérissent et l’activité économique déserte ces territoires. Les Français préfèrent de plus en plus faire leurs courses au marché, dans des magasins spécialisés ou des coopératives locales plutôt que dans une grande surface standardisée. Ces modes de distribution, de moins en moins alternatifs, permettent de favoriser l’économie locale et l’agriculture paysanne qui fut longtemps menacée par la production intensive et les lois du marché. Notons enfin le bio a vu ses chiffres de vente augmenter de 18 % en supermarché au cours de l’année 2016, bien que certaines études qualifient ces produits de « bio low cost », c’est à dire soumis à la recherche du profit aux dépens de la qualité, ce qui ne sera pas le cas des produits achetés directement aux producteurs au marché ou bien via une AMAP.
Patrice LemaÎtre – Nice-Provence Info