Il a le sourire playmobil, mais derrière son air gentillet et figé, la figurine de Luther, créée en 2015 et qui connaît un grand succès commercial en Allemagne, ne cacherait-elle pas un message antisémite ? En cause, la Bible que le jouet tient ouverte dans la main. Il y est écrit sur la page de gauche : « Livre de l’Ancien Testament. FIN. » Et sur la droite : « Le Nouveau Testament, traduit par le docteur Martin Luther. » C’est le mot « fin » qui pose problème.
ENDE ?
Micha Brumlik, professeur à la retraite et journaliste s’est offusqué de ce « ENDE » écrit en lettre capitale. Fils de réfugiés juifs, il écrit dans le quotidien allemand Tageszeitung, que le fait que le mot « fin » prenne tant de place, dans le mini texte, a un sens théologique précis. Il induit que l’Ancien Testament et sa validité sont achevés et dépassés. Il interroge : « L’Ancien Testament, l’Écriture du peuple d’Israël, commune aux juifs et aux chrétiens, est-il dépassé et hors d’âge, comme de nombreux nazis voulaient le voir, ou est-il aussi important que l’Évangile pour les chrétiens ? »
Les églises protestantes de Hesse et de Nassau ont embrayé sur la polémique, en affirmant que la formulation brandie par le petit personnage pourrait être mal interprétée. Puis, un groupe de théologiens a écrit une lettre commune, dans laquelle il précisait que cette formulation était mal venue, « dans une contexte politique et social où les opinions anti-juives gagnent du terrain ». Cette année 2017, les protestants luthériens fêteront les 500 ans de la Réforme, et en cette occasion, toute polémique qui met en relation Luther et les Juifs devient aussitôt explosive. Ses textes, et notamment l’essai Des Juifs et de leurs mensonges, ont démontré qu’il faisait preuve d’une haine farouche à l’égard du peuple hébreux.
Les créateurs dépassés
Le Bureau national allemand du tourisme affirme qu’il n’avait pas pour but de diffuser des messages antisémites, il en a rempli un autre : 500 000 Luther de 7,5 cm ont été vendus, mieux que la plupart des figurines de pirates ou de chevaliers ! Il se vend en même temps que plusieurs autres produits dérivés, Les pâtes de Luther, les chaussettes de Luther, et bien sûr la bière de Luther ! On ne sait pas ce que le principal intéressé, qui invectivait « l’ivrognerie des Allemands », en aurait pensé.
Devant la polémique, les fabriquants ont décidé de supprimer le mot « ENDE« . La version « théologiquement correcte » sera disponible à partir du mois de mars 2017.