Le séminaire des barbelés

En juin 1945, les autorités militaires et religieuses françaises décident de rassembler les séminaristes allemands détenus dans un camp unique : le séminaire des barbelés à Chartres. Un million de prisonniers de guerre de l’Axe sont détenus sur le sol français en avril 1945. Si les autorités françaises voient dans ces prisonniers la main d’œuvre qui va reconstruire la France, elles prennent aussi conscience qu’il y a « un peuple à rééduquer » pour qu’enfin l’Allemagne trouve la paix. La formation des séminaristes prend alors son importance dans la reconstruction de l’Allemagne future et de son église.

D’Alger à Orléans : les premiers camps de séminaristes

C’est en 1943 en Algérie qu’est née l’idée de « séminaire des barbelés ». Après la défaite du corps expéditionnaire allemand en Afrique du Nord, un monastère près d’Alger a ouvert ses portes aux séminaristes. Cette ouverture a été rendue possible grâce au général Boisseau qui avait compris l’importance de redonner de la spiritualité après la guerre. Il pensait que c’était un puissant facteur de réconciliation. L’objectif était donc de former les prêtres de l’Allemagne future car « ces soldats d’hier, prêtres de demain rapporteront dans leur patrie un vrai potentiel de paix. »

Après la libération de Paris, le général Boisseau de retour en France partage cette expérience avec l’abbé Rodhain, délégué général au culte des prisonniers de guerre. Le séminaire des prisonniers d’Orléans naîtra en avril 1945. Soixante étudiants y reçoivent l’enseignement du père Franz Stock, prisonnier de guerre allemand. Ses anciens étudiants racontent chaleureusement leurs souvenirs du père Stock : « un prêtre fervent », « très marqué, fatigué, ce qui était compréhensible, considérant ce qu’il avait vécu », et qui « prenait grand soin de nous ». Il était « amoureux de la France mais fidèle à son pays, patriote ».

Les anciens séminaristes témoignent aussi de leur quotidien au sein du camp : « À Orléans, nous avions une chapelle et dans notre petite communauté, l’échange spirituel était très important. Nous réfléchissions tous à quoi pourrait ressembler l’avenir, s’il y avait un avenir possible dans l’absolu. » Or, au sein du camp d’Orléans qui comptait 6000 prisonniers, le traitement des séminaristes suscitait des jalousies.

À Chartres, le séminaire des barbelés

Afin d’améliorer les conditions d’étude des séminaristes, un transfert d’Orléans à Chartres est annoncé en juin 1945. Au cours de l’été 1945, 135 séminaristes sont transférés. En octobre, on en compte déjà 300. Les prisonniers sont accueillis par l’abbé Stock qui leur enseigne l’histoire de l’Église. Au sein de ce camp, 939 élèves ont transité, parmi lesquels 630 sont devenus prêtres. Il en sortira même 4 évêques ! Le documentaire relate le quotidien de la vie au camp et les enjeux d’un tel regroupement. En effet, « les églises catholiques et protestantes sont les seules institutions dans lesquelles les Alliés ont confiance. Dans l’Allemagne occupée, l’église va aussi jouer un rôle temporel. »

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