Darnand de Françis Bergeron

Livre après livre, Francis Bergeron raconte l’histoire de ceux qu’on pourrait appeler des « maudits » : Béraud, Léon Daudet, Monfreid, Saint-Loup, Bardèche, Paul Chack, Degrelle. Et, aujourd’hui, dans la collection « Qui Suis-Je » de Pardès, un excellent Darnand.

Etonnant destin que celui de Joseph Darnand (1987-1945), héros de la Première Guerre mondiale et des combats de 1940 (il fera à ce titre la une de Match du 21 mars 1940), patriote de l’espèce amoureuse, « anti-Boche » comme on disait à l’époque, fusillé le 10 octobre 1945 accusé d’avoir collaboré avec l’occupant.

Un « héros » ou un « salaud » ? Comme le montre Francis Bergeron, l’histoire ne s’écrit pas en blanc ou en noir. Né en 1897 à Coligny, dans l’Ain, Darnand est issu d’une famille catholique où l’on est patriote de père en fils. Incorporé en 1914, il se retrouve en première ligne. Caporal en 1917, il fait partie de ces « nettoyeurs de tranchées » qui œuvrent derrière les lignes ennemies. Sa bravoure – il sera blessé – lui vaudra notamment la Croix de Guerre, de nombreuses citations et, en 1927, la Légion d’honneur. En la lui remettant, Raymond Poincaré le qualifiera « d’artisan de la victoire ».

Démobilisé en 1921, il se marie et s’installe d’abord à Lyon, puis à Nice. Il rejoint l’Action française. C’est un camelot du roi intrépide. Mais il va s’éloigner du mouvement royaliste pour rejoindre les Croix de feu. Il les quittera assez vite, en bisbille avec l’immobilisme conservateur de La Rocque. Un court passage au Parti populaire français. L’aventure de la Cagoule. Il est arrêté. Non-lieu après six mois de prison.

En 1939, retour à la riflette : « Je ne crois pas à leur guerre, mais il y a le Boche qui veut prendre sa revanche, alors je pense qu’il faut encore se battre. » Il se bat bien. Mieux que ça : héroïquement. Au sein du corps franc. En 1943, il dira de la guerre civile (on tue plus de Français que d’Allemands) : « C’est le grand déraillement. » Pour remettre la France sur les rails, la Légion française des combattants (une formation interdite par l’Occupant en zone nord) autour du « Chef de Verdun ».

Au sein de la LFC, le Service d’ordre légionnaire (SOL). Son bras armé, en quelque sorte. Et puis, bientôt, la Légion des Volontaires français (LVF). Et la Milice (qui ne fut armée que fin 1943).

En octobre 1945, après une seule audience et trente-cinq minutes de délibération, la messe est dite : Darnand est condamné à mort. Il sera fusillé, étonnant de bravoure une fois de plus, au fort de Châtillon. Francis Bergeron excelle à retracer cet incroyable parcours. En se posant, in fine, cette question que nous nous posons depuis cinquante ans : « Qu’aurais-je fait, moi, en de telles circonstances ? » Avec humilité, il répond : « Je n’ai pas la réponse à cette ultime question. » Loin de la « légende noire », fatalement manichéenne, une approche que l’on pourrait dire « objective » si ce mot n’avait pas été autant galvaudé.

Pardès.

Dessin de Une
Sennep, 1943.

Alain Sanders – Présent

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