Bricks est un documentaire sur le secteur de l’immobilier en Espagne dans la première moitié des années 2010. Le terme anglais international choisi délibérément renvoie à la brique en français. La brique est culturellement très importante en Espagne. Les bâtiments utilisent massivement ce matériau de construction, contrairement à la France voisine par exemple, car les briques sont produites en Espagne de manière particulièrement massive, suivant une très longue tradition qui remonterait à l’antiquité romaine. La taille de la brique correspondrait à la paume de la main du légionnaire romain. L’Espagne dispose de très importants gisements d’argile à brique, pas très loin de Madrid, d’où le succès multiséculaire, pour le moins, de la brique. La brique est aussi à l’origine de très nombreuses expressions idiomatiques en espagnol, dont certaines sont indiquées dans le film ; le réalisateur n’a pas voulu en employer une dans son titre, car elles sont incompréhensibles hors de l’Espagne.
Bricks agace mais n’en reste pas moins intéressant
Le réalisateur est en fait avant tout un sociologue qui a voulu se livrer à une étude large, même s’il sait, heureusement, filmer. Il en résulte une série de scènes, de personnages, de sous-thèmes, pas forcément très bien reliés entre eux, même s’ils ont tous un lien avec le secteur immobilier en Espagne qui a connu une crise terrible. Les mécanismes de cette crise sont rappelés : les ménages en Espagne ont contracté trop facilement des prêts dans les années 2000, pour des montants souvent disproportionnées avec leurs capacités de remboursement réelles ; il s’est ajouté à cela un mécanisme pervers de taux variables, que ne maîtrisaient pas forcément les emprunteurs lors de la souscription, et l’explosion du chômage en Espagne, qui a évidemment accru l’insolvabilité des ménages. Les prix du secteur immobilier, beaucoup trop haut dans les années 2000, se sont effondrés. Les ménages surendettés n’ont donc même pas pu couvrir le montant total de leur dette en vendant, à pertes massives, leurs logements. Les ménages pauvres, expulsés, se trouvent en outre surendettées à vie. Les banques espagnoles, pour beaucoup en faillites, ont été elles renflouées par l’Etat, mais pas les ménages. Bricks montre comment les souffrances et la colère populaires ont été canalisées en Espagne par des organisations-satellites du mouvement néocommuniste Podemos. Certes, il est bon de montrer ce fait indéniable, mais le point de vue du film clairement sympathisant pour Podemos agace. Le communisme n’est certainement pas le remède aux excès du capitalisme, l’Histoire l’a bien et douloureusement montré. Bricks, dans son ensemble, n’en reste pas moins intéressant pour le public curieux de la question.