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Yves de Gaulle, le petit-fils du général, publie chez Plon “Un autre regard sur mon grand-père Charles de Gaulle”. Un livre hommage de celui qui avait 19 ans au décès de son grand-père en novembre 1970. Il continue d’entretenir le souvenir de cet homme qui vécut une relation passionnelle avec la France et quitta le pouvoir après avoir été désavoué par les Français lors du référendum de 1969.
Né en 1890, Charles de Gaulle était foncièrement un homme du XIXe siècle. Et même s’il fut l’un des grands acteurs de la politique française et mondiale du XXe, son attitude a toujours été inspirée par les traditions de son siècle de naissance. L’homme de Londres, le rebelle qui refusa l’Etat français, l’homme de la restauration de la République, le reclus de la traversée du désert, l’homme une deuxième fois providentiel de 1958, l’ambigu auteur du fameux “je vous ai compris” a fini par perdre le pouvoir et connaître la désaffection des Français dans les remous de l’après mai 68.
Il y a 47 ans, le premier président de la Ve République remettait les clés de l’Elysée à son successeur Georges Pompidou. Voilà pour une vision de l’action publique de l’homme du 18 juin et du 13 mai. Mais Charles de Gaulle, c’était aussi un homme privé, le mari d’Yvonne, la tante des Français de l’époque, le père de deux filles et un garçon et le grand-père de cinq petits-enfants dont Yves, aujourd’hui agé de 65 ans.
Dans “Un autre regard sur mon grand-père Charles de Gaulle”, Yves se souvient de cet homme qu’on ne tutoyait pas mais qui n’était pas pour autant rigide ou inabordable pour ses petits-enfants. Et lui, le plus jeune d’une fratrie de quatre, était sans doute son préféré. Le général était toujours libre pour un tête à tête avec le jeune garçon autour, notamment, de la littérature. Il confie que, même président, le général prenait le temps de méditer et trouvait dans ces quelques instants quotidiens de “décrochage”, la source de bien des décisions. Il révèle aussi que loin d’être l’épouse effacée d’un grand homme, sa grand-mère Yvonne ne prenait pas de gants pour dire ce qu’elle pensait à son général de mari. De Gaulle président avait 77 ans quand a éclaté le mouvement de mai 1968. Et c’est vers Yves, alors agé de 17 ans, qu’il se tourne pour lui demander : “Et vous, les jeunes, finalement, que voulez-vous ?” A quoi le jeune de Gaulle répond au vieux : “Vivre davantage”.
Mais la partie sans doute la plus émouvante de ce récit reste la dernière, celle qui évoque l’après présidence du vieux combattant. Il a alors retrouvé le domaine de la Boisserie, dans cette Champagne qui, entre 1946 et 1958, avait accueilli sa traversée du désert. Cette fois, plus de perspective politique, la retraite est tardive mais elle est définitive. Le général s’éteindra le 9 novembre 1970 en regardant les informations régionales tout en faisant une réussite, attablé à son bureau. Yves avait passé tout l’été précédent avec son grand-père. Il raconte dans son livre que, loin de toute amertume, le général était confiant dans la trace politique qu’il laissait. Il était persuadé que le gaullisme avait un avenir, qu’un successeur saurait faire fructifier ce qu’il avait semé.
Quarante-cinq ans après la dispariton du général, Yves de Gaulle nous offre l’occasion de préciser l’image que nous nous faisons de cette personnalité hors du commun. Celle d’un homme du XIXe qui a contribué à façonner la France du XXIe, et le créateur d’une cinquième République dont chacun pressent aujourd’hui qu’elle vit ses dernières années. Celle aussi d’un grand-père attentif sinon chaleureux.
Un autre regard sur mon grand-père Charles de Gaulle d’Yves de Gaulle – Plon, 304 pages 18 euros 90