Moins connu que Charb, Cabu, Wolinski et Tignous, Philippe Honoré dit Honoré venait de tweeter ses voeux au grand calife…
Autodidacte né en 1941, Honoré publie son premier dessin de presse à 16 ans, dans le journal Sud-Ouest, selon le Magazine Littéraire, l’un des nombreux médias où l’on pouvait croiser ses dessins en noir et blanc au style suranné (Le Monde, Libération, les Inrockuptibles).
Il collaborait avec Charlie Hebdo depuis sa reparution en 1992, selon le site des éditions Larousse, pour qui il avait notamment illustré l’édition anniversaire 2010 du Petit Larousse. Ses travaux ont fait l’objet de nombreuses expositions collectives et il avait également mis en images Ouvert le jour et la nuit (sur des textes de Rufus, 1995), le Bestiaire d’Alexandre Vialatte (2002) et la Symphonie animale d’Antonio Fischetti (2007).
Il était le moins connu des cinq dessinateurs assassinés dans les locaux de Charlie Hebdo. Sans doute parce qu’il était d’abord un illustrateur virtuose, qui s’exprimait plus par le graphisme que par les mots pour croquer un portrait, alerter sur l’écologie, dénoncer la politique d’austérité ou l’emprise de la religion.
Et pourtant Philippe Honoré, 73 ans, qui signait Honoré en superposant, dans une petite case carrée, les trois premières lettres de son nom puis les trois suivantes, était une figure du journal satirique, où il publiait deux à trois dessins chaque semaine. Il était plus que cela. « Un immense dessinateur », confie notre collaborateur Plantu.
Né le 25 novembre 1941 à Vichy, cet autodidacte qui place ses premiers dessins dans le quotidien Sud Ouest dès l’âge de 16 ans, fait partie de l’équipe de Charlie depuis sa reparution en 1992. Mais il a aussi publié dans des dizaines de titre comme Le Monde, Libération, Les Inrockuptibles, Le Magazine littéraire, Lire, L’Evénement du jeudi, La Vie ouvrière, Hara-Kiri…
Honoré avait une gueule. Cheveux longs et blancs, moustache et barbe gauloise. « On l’aurait bien vu au milieu des ouvriers de Germinal, le film de Claude Berri », confie Plantu, qui ajoute : « Il était un enragé, mais un enragé très poli et doux. Tout ce qu’il disait de violent passait par le trait. » Ah le trait d’Honoré ! Gras mais élégant, d’un noir profond, comme celui du graveur sur bois du XIXe siècle. A l’ancienne.
Mais aux thèmes et au style modernes. Son talent d’encre donnait du contraste à Charlie et de la chair à une information. Parfois mis au service d’autres titres : comme Libération qui arbore à sa « une » du 31 mars 2012, en pleine affaire Bettencourt, son portrait de Nicolas Sarkozy assis sur un boulet prêt à exploser.
Il a publié nombre de couvertures des « Petits Classiques Larousse ». Il n’avait pas son pareil pour ciseler des lettres de l’alphabet, comme on peut le voir dans l’édition anniversaire, en 2010, du Petit Larousse en illustrant des mots de la langue française.
Une de ses spécialités était d’inventer des rébus illustrés pendant plus de vingt ans pour le magazine Lire : petits personnages, mots à tiroirs, et solution autour d’un titre de livre ou de son auteur. « Mon grand bonheur, c’est de provoquer un plaisir intellectuel aux gens qui cherchent les solutions. Et un plaisir visuel, car j’essaie au maximum de réaliser une vraie image qui tienne toute seule, sans texte », confiait-il à La Montagne, en novembre 2012, à l’occasion d’une exposition de ses rébus dans le cadre de la Foire du livre de Brive. Ces rébus ont été publiés en albums chez Arléa.
On lui doit aussi Un bon dessin vaut mieux qu’un long discours (Paris éd., 1985) ou encore Je Hais les petites phrases (Charlie Hebdo-Les Echappés, 2011) dans lequel il a réuni les citations marquantes – et illustrées – du quinquennat Sarkozy. Honoré est l’auteur du dernier dessin twitté par Charlie, quelques instants avant le carnage. On y voit le chef de l’Etat islamique, Abou Bakr Al-Baghdadi, présenter ses vœux : « Et surtout la santé ! »