Carré 35 (Bande-annonce)

Eric Caravaca a grandi avec un fantôme. Celui de sa sœur aînée décédée à seulement 3 ans, Christine, qu’il n’a pas connue et dont sa famille a dissimulé l’existence. Elle est enterrée dans le carré 35 du cimetière français de Casablanca, au Maroc. Que s’est-il passé? L’acteur de La Chambre des officiers, aujourd’hui âgé de 50 ans, a mené l’enquête et signe un documentaire autobiographique captivant, qui se regarde comme un polar. Pour découvrir la vérité sur la disparition mystérieuse de Christine, il a interrogé ses proches, en particulier son père et sa mère qui livrent des versions contradictoires face caméra, et par conséquent installent le malaise. Il privilégie une approche frontale pour apprivoiser la mort à travers le souvenir d’une enfant dont il ne subsiste aucune photo (pas même sur sa pierre tombale, vandalisée), ni aucun document attestant son identité (tout a été brûlé). Carré 35, un récit à valeur thérapeutique sur le poids du secret, bouleverse par sa sincérité.

Pendant quatre ans, Eric Caravaca questionne ses parents pour obtenir des réponses

Tout commence sur le tournage de La Petite Chambre, de Stéphanie Chuat et Véronique Reymond, il y a six ans en Suisse. Un jour, Eric Caravaca se balade dans un cimetière entre deux prises. “Je me suis arrêté devant une sépulture où figurait l’épitaphe suivante : “Chère petite fille, nous t’aimons plus que de raison.” J’ai fondu en larmes. J’étais envahi par une tristesse qui n’était pas la mienne. J’ai alors cherché à comprendre d’où elle venait.” Au cours de l’adolescence, il avait vaguement entendu parler de Christine. “J’avais la conviction qu’on me cachait quelque chose. Face au tabou, on a l’intuition que si on en parle on va déclencher un cataclysme. Le passé n’est pas forcément enseigné. En chacun de nous, il y a un continent enfoui de ce qu’ont vécu nos ancêtres, qu’on ignore souvent, qui nous constitue, qui forge notre comportement.”

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Pendant quatre ans, Eric Caravaca questionne ses parents pour obtenir des réponses. Il ne se décourage pas et insiste pour percer leurs défenses. “Au début, j’y suis allé doucement pour lever la chape de plomb. D’autant que mon père, atteint d’un cancer au cerveau, allait bientôt mourir. C’est lui qui m’a avoué l’existence de ma sœur et son prénom. Mon frère ne m’a pas aidé, il préférait oublier. Ma mère a élaboré un mensonge et vit toujours dans le déni à 82 ans.” Au début des années 1960, le couple habite Casablanca, il est ingénieur en BTP et elle expert-comptable. Ils se marient. Rapidement elle tombe enceinte. Naît un joli bébé blond aux yeux verts. “Ma mère a déclaré que Christine souffrait d’une malformation cardiaque. Mon père, qu’elle était décédée à quatre mois. Il n’avait plus toute sa tête, mais il m’a donné un indice important : c’est à cet âge qu’ils se sont rendu compte qu’il y avait un problème.”

La maladie bleue

Le verdict tombe : Christine est trisomique. Sa mère ne l’accepte pas. D’autant qu’elle est frappée par une pathologie liée à sa condition : la maladie bleue. “Le cœur n’évacue pas le dioxyde de carbone, le patient devient cyanosé et étouffe si on ne lui donne pas d’oxygène. Elle s’est endormie pour toujours un soir de 1963. Cette ‘anomalie’ a été perçue comme une honte dans ma famille qui préservait les apparences en société. Ils fermaient déjà les yeux sur la violence quotidienne de la colonisation.”

Eric Caravaca explique à quel point sa mère s’est sentie coupable de l’anormalité de sa fille. “Le rôle de la femme consistait à donner une descendance à son mari. Ma grand-mère est morte d’épuisement à 40 ans après avoir eu douze enfants, sept ont survécu. Elle en avait un dans le ventre quand elle a rendu son dernier soupir. Chez les chrétiens espagnols, on n’avortait pas.” Quand il s’est rendu pour la première fois sur la tombe de Christine, Eric Caravaca n’a pas pleuré. Les jours qui ont suivi, il a développé un eczéma. “Il fallait que ça sorte! Le film l’a ressuscitée. Elle peut partir tranquille maintenant. Il faut s’occuper de ses morts pour pouvoir se consacrer aux vivants.”

 

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