Sécu/ “Je veux cotiser plus pour aider tous les étrangers” (Vidéo)

Pierre Cassen revient sur le scandale révélé par une enquête sénatoriale : il y aurait en France 84 millions d’assurés sociaux pour 67 millions d’habitants…

 


La députée Carole Grandjean et la sénatrice Nathalie Goulet ont mené une mission parlementaire sur la fraude sociale. Elles ont présenté, ce mardi 3 septembre, leurs premières propositions pour lutter contre le phénomène grandissant : sur 450 milliards de prestations versées, la fraude est estimée entre 3 et 10 %.

Explications du magistrat Charles Prats pour Boulevard Voltaire.

Entre trois 3 et 10 % de fraude, soit jusqu’à 20 milliards d’euros de fraude annuelle rien que sur le périmètre de la CNAM. Cela confirme-t-il ce que vous redoutiez ?

Le principal scoop du rapport d’État rendu avant-hier était le nombre de numéros de Sécurité sociale. 84,2 millions de personnes réputées en vie, dont 3,1 millions de centenaires. Cela ne veut pas dire qu’il y a 84 millions de personnes qui touchent des prestations, mais cela signifie qu’il faut évidemment regarder ce qu’il se passe lorsqu’on a un écart de 17 millions de numéros de Sécurité sociale. Cela mérite tout de même qu’on vérifie.
Je rappelle qu’en 2013, un rapport conjoint de l’inspection générale des finances et de l’inspection générale des affaires sociales avait détecté 7 millions de bénéficiaires supplémentaires par rapport aux personnes qui étaient censées être sur le territoire. Depuis, nous n’avons pas eu beaucoup de nouvelles sur ce qui a été entrepris pour vérifier ce point.
Aujourd’hui, on découvre qu’il y a de nouveau un « gap » entre les numéros de Sécurité sociale existants et le nombre de gens qui sont censés être sur le territoire. C’est très inquiétant.
Ce soir, sur Twitter, on vient de découvrir que des documents à en-tête de la Cour des comptes circulaient. Il semblerait que le chiffrage de 3 à 10 % de taux de fraude au niveau de l’assurance maladie émane de la Cour des comptes. Je ne sais pas si ce document est officiel ou provisoire. Mais les dépenses d’assurance maladie représentant 200 milliards d’euros par an, 3 à 10 % de fraude sur l’assurance maladie pourrait représenter jusqu’à 20 milliards de fraudes. C’est assez cohérent. Cela correspond au chiffrage qu’avait déjà fait un réseau anti-fraude européen de l’assurance maladie. Il chiffrait déjà la fraude de l’assurance maladie entre 5,5 et 7,3 % annuellement. On est dans les mêmes ordres de grandeur.
En 2010, 10,5 milliards de fraudes ont été estimés pour la France. Un an ou deux après, on était à 14 milliards, rien que pour la branche maladie.
Pour la Cour des comptes, on serait entre 6 et 20 milliards. Cela corrobore les chiffres qui ont été donnés par les parlementaires. Ils se font, d’ailleurs, très violemment agresser et de manière assez incompréhensible dans la presse et par les organismes sociaux. Ces derniers ont sorti des communiqués très violents contre les deux parlementaires qui sont missionnées par le gouvernement. C’est très étonnant. Je pense qu’elles doivent poursuivre leur travail.

Comment est-il possible que la Sécurité sociale enregistre 3 millions de centenaires en France ?

Cette histoire des 3,1 millions de centenaires, 1,5 million nés en France et 1,6 million nés à l’étranger, est très surprenante et inquiétante.
Cela peut s’expliquer pour les gens nés à l’étranger. Ils sont considérés comme décédés dans le registre national lorsqu’un acte de décès est transmis à l’INSEE ou à l’assurance vieillesse. Pour des personnes nées à l’étranger, on peut comprendre que l’acte de décès soit difficilement transmissible ou pas transmis du tout.
En revanche, pour les gens nés en France et qui, a priori, vivent en France, l’INSEE explique que la mise à jour est hebdomadaire. Il y a un tel différentiel que c’est assez incompréhensible !
À la suite de cette mission, les parlementaires doivent aller dans le répertoire national commun de la protection sociale pour faire des requêtes informatiques et voir combien de personnes de plus de cent ans perçoivent des prestations sociales. Cela permet de voir si cela correspond à la démographie ou s’il y a un vrai souci.
Ces requêtes devront être faites. Elles sont d’ailleurs prévues par le Code de la Sécurité sociale.
Très objectivement, je ne pense pas qu’un grand nombre de centenaires touchent des prestations. On est davantage en phase d’un problème de mise à jour du système. Cela est révélateur de la nécessité d’avoir un système moderne. Avoir 20 % des identités réputées en vie en supplément par rapport aux gens qui vivent en France, c’est juste pas possible !

La première partie de ce rapport s’appelle « Une politique en apparence active, aux résultats modestes et aux ressources fragmentées ». En termes très polis, cela veut dire « on ne sait pas vraiment ce qui s’y passe, rien n’est vraiment fait pour que cela change ». Comment la Sécurité sociale a-t-elle pu laisser passer cela ? Pourquoi ne fait-elle pas énormément d’efforts pour juguler ces fraudes ?

Je ne connais pas ce document de la Cour des comptes. J’ai simplement vu passer une photo. Les parlementaires ne me donnent pas leurs documents. J’ai été entendu par cette mission comme d’autres experts. Il se trouve que je connais un peu le sujet. C’est mon métier. Je lutte contre la fraude fiscale et sociale depuis 25 ans. Il faut attendre qu’il soit peut-être publié pour qu’on puisse l’analyser.
La Cour des comptes faisait un constat très alarmiste sur le niveau de la fraude en matière d’assurance maladie. On peut se dire que c’est peut-être la même chose dans les autres branches.
On dit depuis très longtemps que la fraude aux prestations sociales est massive.
Dès qu’on parle de lutter contre la fraude aux prestations sociales, la levée de boucliers médiatique et politique est impressionnante. Depuis 48 heures, nous sommes insultés et traînés dans la boue pour avoir simplement évoqué la possibilité de l’existence de fraudes aux prestations sociales.

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