Les 11 juillet dernier, le père Arnaud du Cheyron, curé de Mirande (Gers), a appris qu’il rejoindra l’Académie pontificale ecclésiastique à Rome afin de devenir nonce apostolique. Il est le premier Français depuis 2006 à rejoindre cet « ENA du Vatican », fondé par l’abbé Pierre Garagna en 1701 et qui a formé cinq futurs papes (Clément XIII, promotion 1714, Léon XII, promotion 1783, Léon XIII, promotion 1832, Benoît XV, promotion 1879 et Paul VI, promotion 1921).
Trois conditions doivent être réunies pour pouvoir prétendre à une place dans la prestigieuse académie : avoir moins de 35 ans, parler trois langues et posséder une licence en droit canonique ou en théologie. « Je ne suis pas rentré dans l’Église pour être nonce. Mon objectif était d’être prêtre d’une paroisse », confesse cependant le curé de campagne de 32 ans, qui admet avoir « grandes difficultés » en anglais. S’il affirme le contraire, devenir nonce apostolique représentera cependant pour le père du Cheyron une vraie montée en grade.
Les ambassadeurs du Saint-Siège
Les nonces apostoliques sont les ambassadeurs du Saint-Siège. Aujourd’hui quatre Français exercent ce service prestigieux : Alain Lebeaupin pour l’Union européenne, Nicolas Thevenin au Guatemala, Jean-Marie Speich au Ghana et, dernier nommé, Christophe Pierre, en poste aux États-Unis depuis le 12 avril 2016. Dès les premiers siècles de l’ère chrétienne, les papes envoient comme représentants — qualifiés de « légats » — des diacres, prêtres ou évêques aux conciles qui se tiennent loin de Rome ou des « vicaires apostoliques » auprès des évêques de provinces éloignées. À partir de 683, sous Léon II, le souverain pontife bénéfice d’un représentant permanent à la cour de Constantinople. Bien que le terme de « nonce » existe depuis le XIe siècle, il faut néanmoins attendre la fin du XVIe siècle, quelques décennies avant les traités de Westphalie qui donnent naissance à la diplomatie moderne, et le pontificat de Grégoire XIII pour que le système de nonciature tel qu’on le connaît aujourd’hui.
Le rôle des nonces est « de rendre toujours plus solides et efficaces les liens d’unité qui existent entre le siège apostolique et les Églises particulières », selon le code de droit canonique (c. 364). À cette tâche s’ajoute la « charge particulière » de« promouvoir et d’entretenir les rapports entre le Siège Apostolique et les Autorités de l’État » (c. 365 § 1) et donc de représenter le pape, en tant que chef de l’Église catholique, d’un point de vue diplomatique. C’est en vertu de cela qu’il assure les relations diplomatiques entre le Saint-Siège et les autorités civiles, ainsi que de garantir le lien entre le Vatican et les églises nationales. Le nonce prépare, à ce titre, les dossiers de nomination d’évêques.
« Être au service de l’Évangile »
La nonciature à Paris, assurée depuis 2009 par l’archevêque italien Mgr Luigi Ventura, est l’une des plus prestigieuse, même si le rôle du non apostolique auprès de la République française a diminué depuis la loi de séparation entre l’Église et l’État de 1905. Il s’agit du dernier poste diplomatique de son titulaire, qui est ensuite appelé à prendre la tête d’un dicastère, sort de ministère du Vatican, ou à devenir cardinal. En plus de son rôle auprès de la Conférence des évêques de France, il remplit également le rôle de doyen du corps diplomatique à Paris, ce qui lui permet de s’adresser au président de la République lors de la présentation des vœux au corps diplomatique en début d’année. Parmi les nonces en France, on peut relever un certain Giuseppe Roncalli, de 1944 à 1953, futur pape sous le nom de Jean XXIII.
Au terme d’une scolarité de deux ans, ponctuée de cours d’histoire, de droit international, de doctrine sociale de l’Église et de langues étrangères, Arnaud du Cheyron et sa quinzaine de camarades débuteront leur nouvelle carrière, alternant en général des postes diplomatiques à travers le monde et des fonctions au Vatican : attachés de nonciature (un an), secrétaires de nonciature (six ans), auditeurs de nonciature (six ans), puis conseillers de nonciature. Les plus chanceux parmi ces derniers seront choisis par le pape, après être faits archevêques, afin d’avoir un rang au moins égal avec les évêques des pays dans lesquels ils sont nommés, pour devenir nonces apostoliques. C’est tout le bien que nous souhaitons au père du Cheyron, qui estime « fabuleuse » la possibilité d’être « l’interface entre le Saint-Siège et la population, être au service de l’Évangile ».