2 siècles et plus de 18 000 journaux cherchent repreneur!

Voilà des mois qu’Hélène Murat, 84 ans, cherche en vain un repreneur pour sauver une collection entamée voici trois générations et dont elle est la dernière dépositaire: près de 18.000 journaux anciens, vieux pour certains de plus de deux siècles.

Pour l’octogénaire de Royan (Charente-Maritime), rentière, l’argent n’est pas vraiment le problème. Elle dit d’ailleurs n’avoir aucune idée de la valeur réelle de cette collection… Ce que veut Mme Murat, c’est éviter qu’elle ne soit dispersée par une “vente à la découpe”.

“Je la vends pour la protéger, pour qu’elle ne soit pas abandonnée et mieux peut-être, poursuivie. J’ai 84 ans et je n’ai pas d’enfant”, explique-t-elle.

Le problème, c’est que ces archives monumentales prennent de la place: l’ensemble de la collection occupait deux chambres et un long couloir de son appartement cossu, se souvient l’élégante vieille dame. Mais “aujourd’hui les journaux sont stockés dans un garde-meuble” dans le sud de la France et représentent un volume de plus de 30 m3 de papier, souligne-t-elle.

Mme Murat se refuse donc à s’en séparer à l’unité ou par lots. “Cela représente deux siècles de travail pour les rassembler. Pas question de les éparpiller!”, s’emporte-t-elle à cette seule idée, soulignant l’importance historique de sa collection, dont le plus ancien exemplaire, le numéro 1 de “L’avant-coureur”, présenté comme “le premier journal du 19e siècle”, remonte à 1800.

C’est Michel Murat, comte de Murat (1849-1921), issu d’une famille auvergnate anoblie par Louis XV, qui a entamé cette collection, sans même en avoir conscience au départ. “Il conservait simplement les journaux portant sur un événement important ou les nouveaux titres, quel que soit le thème”, explique Hélène. Son fils Auguste (1882-1954), puis son petit-fils Jean (1921-2010), le défunt mari de Mme Murat, ont pris le relais, l’étoffant au fil des ans.

– The Daily Picayune et numéros zéro –

La collection est doublement riche. D’un côté, environ 14.000 exemplaires de numéros spéciaux, historiques et de spécimens, sur tous les sujets possibles: grands événements politiques (la Commune de Paris, les guerres, les couronnements), funérailles (Victor Hugo, Louis Pasteur, Auguste Rodin), expositions, procès, etc. On y trouve aussi l’insolite “The Daily Picayune” de 1903, édition du journal de la Nouvelle-Orléans consacrée au centenaire de la cession de la Louisiane par la France aux Etats-Unis, le Journal officiel de l’empire français de 1869 ou encore Le siège de Paris illustré (1870-1871).

De l’autre côté, les numéros zéro: “Ils étaient distribués dans la rue pour être testés auprès du public avant le lancement officiel”, rappelle Hélène Murat. “Parfois il y avait un numéro zéro, puis un numéro double ou triple zéro selon les besoins”. Parmi ces raretés, Marianne dans sa version de 1932, Marie-Claire (1937), Elle (1945) ou encore Lui (1963).

Hélène Murat a elle-même participé activement à la constitution de cette collection. Très régulièrement, avec son mari, ils couraient les brocantes pour l’enrichir, et la bichonner ensuite. Certains journaux ont été reliés pour constituer des livres par année, “car nombre de ces publications ne comptaient régulièrement qu’une page pliée en deux”.

Mais “beaucoup de journaux publiés avant 1970 sont conservés dans des housses plastiques que j’ai fabriquées moi-même, pour ne pas que l’encre déteigne”, précise fièrement Mme Murat.

 

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