La disposition en cause avait été adoptée, sous la Restauration, par la loi du 14 juillet 1819 relative à l’abolition du droit d’aubaine et de détraction[1]. Les requérantes soutenaient, à l’occasion d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) que la disposition contestée méconnaissait le principe d’égalité devant la loi, d’une part, et le droit de propriété, d’autre part. L’article litigieux était le suivant :
« Dans le cas de partage d’une même succession entre des cohéritiers étrangers et français, ceux-ci prélèveront sur les biens situés en France une portion égale à la valeur des biens situés en pays étranger dont ils seraient exclus, à quelque titre que ce soit, en vertu des lois et coutumes locales »
Le droit de prélèvement institué par l’article 2 de la loi du 14 janvier 1819 vise à protéger les héritiers français des effets d’une loi successorale étrangère discriminatoire à leur égard. Le cohéritier français doit avoir été exclu de tout ou partie de la succession par la loi successorale étrangère. Ainsi, il permet à tout Français de réclamer sur les biens situés en France la part que lui octroierait l’application de la loi successorale française.
Si le Conseil constitutionnel a considéré que les dispositions précitées de la loi étaient conformes à la Constitution, il a en revanche conclu que la disposition réservant le droit de prélèvement sur la succession au seul héritier français « établit ainsi une différence de traitement entre les héritiers venant également à la succession d’après la loi française et qui ne sont pas privilégiés par la loi étrangère. » Cette dernière disposition a donc été censurée par les « sages » au motif qu’elle méconnaissait le principe d’égalité. En effet, bien que le Conseil ait tenu a rappeler « que le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit », il a considéré que le fait de réserver aux seuls Français la possibilité de jouir du droit de prélèvement était contraire à la Constitution.
[1] Le droit d’aubaine était un privilège du Roi de France qui pouvait hériter de tous les biens d’un étranger résidant en France. Le droit de détraction accordait au monarque le pouvoir de distraire une partie de la succession qu’il autorisait un étranger à accueillir.
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