Creepy (Bande-annonce)

Creepy, soit terrifiant en anglais ou en japonais qui a emprunté le terme à l’anglais, est la dernière tentative dans le genre du policier, et du policier réaliste, du maître nippon du fantastique sombre Kiyoshi Kurosawa. Un professeur de criminologie dans une université japonaise, policier reconverti, est invité par d’anciens collègues policiers à les aider dans des énigmes criminelles non-résolues. Il y aurait des liens à faire entre des disparitions inquiétantes de familles entières dans plusieurs villes du Japon. S’agirait-il de l’action d’un tueur en série ? Le criminologue doute fortement, ce qui est d’ailleurs un comble car il l’enseigne, de la pertinence de son savoir. Ces fameux portraits-types de tueurs en série de la criminologie américaine peuvent-ils avoir quelque application pratique, du moins hors des Etats-Unis ? Selon lui les criminels japonais sont beaucoup plus sobres, impulsifs, imprévisibles, donc d’autant plus difficiles à arrêter, que leurs baroques correspondants américains.
 

Pendant ce temps, sa femme, épouse au foyer, sans enfants, s’ennuie dans la journée. Elle essaie pathétiquement de nouer des relations de bon voisinage, évidence dans la culture japonaise, mais se voit repoussée par des voisins grossiers. Est-ce bien possible ? Oui. Où va le Japon ? Elle finit tout de même par créer un lien bizarre avec un voisin, en apparence père de famille paisible, qu’elle soupçonne en même temps, ni plus ni moins, d’être un tueur en série, trahi par son allure étrange et ses propos parfois singuliers. A ce point de l’intrigue, le spectateur s’interroge : soit il n’y aura aucun lien entre les deux histoires, celle du mari et celle de la femme, et il sera difficile de poursuivre le film, soit il y en aura un, et alors ce sera tout de même très peu crédible. Est-il possible de se jeter ainsi, par un si improbable hasard, dans la gueule du loup?!
 
La deuxième hypothèse sera donc la bonne. Le criminologue rencontrera donc un tueur en série nippon, du type baroque du manipulateur, qui ne tuerait pas directement mais qui, via une forme de pouvoir psychique causé par son charisme particulier, induirait d’autres à assassiner pour lui. Le problème évident pour le spectateur est que ce voisin à l’allure de semi-clochard nippon possède un charisme nul, ne peut inspirer que méfiance, sinon répulsion. L’histoire ne tient donc absolument pas. Il est clair que le maître du fantastique sombre nippon s’est égaré dans Creepy. Dans le genre où il excelle, moyennant quelques petites modifications, il aurait pu sur cette base réaliser un bon film. Là, il propose dans un policier réaliste, en principe, une intrigue abracadabrantesque. C’est bien dommage. Creepyest donc complètement manqué.

Lu sur RéinformationTV

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