Le 16 mai 1829, cependant que le gouvernement de Jean-Baptiste de Martignac, sous le règne de Charles X, avait été remanié trois fois depuis le début de l’année, le « journal non politique, paraissant le mercredi et le samedi » intitulé Le Grondeur, lance un appel humoristique en vue de pourvoir des postes ministériels qu’il juge vacants…
On demande un ministre des affaires étrangères qui ne soit pas trop étranger aux affaires, et qui ne haïsse pas trop la charte… On ne tient pas positivement à ce qu’il sorte d’ambassade.
Extrait de « Le Grondeur » du 16 mai 1829
“On demande un ministre de la justice qui ait l’envie d’être juste, et ne dépense pas près de cent mille francs pour faire décorer sa salle à manger… Il n’est pas nécessaire qu’il soit maître d’armes, doctrinaire, girouette ou basculiste.
On demande un ministre de l’intérieur qui connaisse un peu l’esprit des départements et les besoins de la génération actuelle. On le voudrait franc, loyal autant qu’un diplomate peut l’être… On voit qu’il n’est pas absolument nécessaire que ce soit un gascon !
On demande un ministre de la marine qui connaisse un peu cette arme savante ; qui sache ce que c’est qu’un grelin et une garcette ; qui ne prenne pas l’artimon pour le perroquet, et la barre pour le cabestan, et qui puisse distinguer un riz au lait d’un ris de voile… On avertit qu’il ne suffit pas que ce soit un fort honnête homme, possédé des meilleures intentions… On veut que l’individu demandé sache un peu son métier, et connaisse la mer autrement que pour n’avoir fait que deux ou trois traversées.
On demande un ministre des cultes ; mais comme un ministre des cultes doit les protéger tous, et qu’il serait presque indispensable que ce fût un homme qui crût à tout et ne crût à rien, on exige un particulier qui soit fort indifférent en matière de religion… Il est donc de nécessité absolue que le sujet qui se proposera ne soit pas prêtre, et surtout prêtre catholique.
On demande un ministre de la guerre qui soit capable de raisonner plan de campagne et bataille, un peu proprement avec nos vieux généraux… On n’exige pas que ce soit un Turenne, un Bonaparte ou un Ney, ce serait trop demander ; mais on veut au moins une espèce de militaire, qui n’ait pas pris ses grades dans les bureaux, et qui n’ait pas gagné ses épaulettes d’officier-général dans un fauteuil administratif. On désirerait aussi qu’il ne pesât pas 200 kilos, afin qu’il pût au besoin monter à cheval, et faire de fréquentes tournées dans les divisions militaires.
S’adresser, pour la présentation des sujets, en face du Pont-Royal, la grande grille à main droite.
Nota. On est très pressé !!!!!!!!”