Sans attendre que les causes de l’empoisonnement au gaz de plus de 80 personnes dans la ville syrienne de Khan Cheikhoun ne soient déterminées, Libération a choisi pour sa Une de montrer des corps d’enfants. Plusieurs internautes se disent choqués.
L’image choisie par Libération pour son édition du 6 avril ne laisse personne indifférent. Mais le choix d’une photo sensible, voire choquante est-il justifié ?
Oui, selon Laurent Joffrin, directeur de la rédaction de Libération : «On agit dans l’idée de faire au mieux selon les circonstances. Cette fois, il nous a semblé utile de publier cette photo pour la prise de conscience», a-t-il expliqué à 20 minutes, afin de défendre l’utilisation d’une photo d’enfants tués par des gaz toxiques. La photo, disponible ici (attention, image pouvant choquer), extraite d’une vidéo diffusée par l’agence Associated Press, montre des corps d’enfants entassés sur fond noir. Sans floutage, et avec le titre accusateur : «Les Enfants d’Assad».
Le quotidien dit avoir choisi cette image après de longues discussions et après avoir vérifié son authenticité. « Elle reflète une réalité, une attaque au gaz. Elle témoigne de l’horreur absolue, car ce sont des enfants, c’est le fait qui est choquant, pas l’image», précise Laurent Joffrin.
Mais, sur les réseaux sociaux, les internautes ne sont pas tous du même avis. Nombreux sont ceux qui s’interrogent sur l’opportunité de montrer des victimes, qui plus est des enfants, sans même flouter les visages. Certains se rappellent de l’interdiction faite par le ministère de l’Intérieur de diffuser les photos des victimes du Bataclan.
D’autres enfin renvoient Libération à sa politique édictée en matière d’images de victimes après l’attentat au camion de la promenade des Anglais à Nice, le 14 juillet 2016. Le quotidien préconisait d’éviter les «vidéos choquantes» et de ne pas propager de «rumeurs». En d’autres termes, Libération se refusait à jouer sur le pathos et mettait en garde contre les conclusions hâtives.
La photo reprise par Libération est par ailleurs la même que Nikki Haley, représentante américaine permanente aux Nations unies, avait brandie devant le Conseil de sécurité afin d’accabler le gouvernement de Bachar el-Assad.
Les pays occidentaux ont immédiatement pointé la responsabilité, selon eux, de Damas, évoquant une attaque chimique contre les civils. Face à ces accusations, La Russie estime que les premières accusations contre Assad ont été portées «alors que personne n’avait encore accès à cette zone».
La Défense russe a déclaré par ailleurs être en mesure de produire des preuves irréfutables que l’aviation syrienne avait en réalité visé un entrepôt des «rebelles», dans lequel il s’est avéré qu’ils stockaient des produits chimiques.