Enfin une biographie de Jean Mabire !

Plus de cent biographies ont été publiées à ce jour dans la collection désormais bien connue « Qui suis-je ? » des éditions Pardès. Et aujourd’hui nous est présenté le portrait de Jean Mabire. Un tel ouvrage était absolument nécessaire à plus d’un titre. Jean Mabire est en effet l’auteur d’une centaine de livres. Certains d’entre eux ont connu un succès considérable, et ont été à l’origine de bien des engagements intellectuels et politiques.

Pourtant on savait peu de choses sur lui On lui connaissait une origine normande, un passé militaire, et une certaine attirance pour des théories plutôt paganistes et de la « nouvelle droite ». Mais de sa jeunesse, de ses années de formation, de sa famille, de ses engagements personnels réels, on n’en savait que ce qu’il avait bien voulu en dire, dans quelques autoportraits, et dans le long entretien repris chez Dualpha en 2014, sous le titre Entretien avec Jean Mabire, conteur des guerres et de la mer.

Ce « Qui suis-je ? » comble donc une vraie lacune, répond à un besoin. Comme d’ailleurs ceux consacrés à Brigneau, Bardèche, Boutang ou ADG, par exemple. Nous avons ici un journaliste et écrivain qui a eu une vraie influence sur plusieurs générations de lecteurs et de militants. Cette rapide biographie de 126 pages arrive donc à point.

On regrettera que l’illustration de couverture nous présente un Mabire débonnaire des dernières années. Nous aurions évidemment préféré une photo du Mabire de l’époque « guerre d’Algérie », par exemple cette fameuse photo prise en 1958 au Centre d’entraînement à la guerre subversive de Philippeville, en Algérie. A 32 ans, il a un faux air de Drieu La Rochelle. Dans sa tenue d’officier, il personnifie parfaitement ce guerrier viril et sûr de lui dont, sous quelque uniforme que ce soit, il n’a jamais cessé de dresser le portrait, dans toute son œuvre. Mais le code de la collection « Qui suis-je ? » prévoit une photo en couleur pour la couverture et, comme pour le « Qui suis-je ? » consacré à Maurice Bardèche, il était apparemment nécessaire de se rabattre sur une photo beaucoup plus récente, moins représentative de l’œuvre, mais en couleur.

Jean Mabire est un grand historien militaire, et à ce titre son œuvre restera. Les plus grands éditeurs ne s’y étaient pas trompés. Fayard et les Presses de la Cité ont su tirer parti de la puissance de travail de l’écrivain, qui nous laisse une centaine de travaux sur à peu près toutes les armées du monde, de l’époque moderne, en particulier pendant les deux guerres mondiales.

Des fêtes rythmées par le tambour et la trompette

Le plus passionnant du livre est sans doute le récit de son adolescence militante (chez les Jeunes du Maréchal puis dans les Jeunesses francistes). Ce sont très certainement les camps francistes – dont celui de Semblançay, près de Tours – qui lui donneront à jamais cette passion pour l’uniforme, et ce goût des fêtes d’allure militaire, rythmées par le tambour et la trompette. La suite est plus connue. Mais le Mabire de Patrice Mongondry constitue une synthèse très utile pour s’y retrouver dans les ouvrages de Mabire, et découvrir, s’il en était besoin, les autres facettes de son œuvre : sa revue Viking et ses créations artistiques en tant qu’imagier normand, l’écrivain régionaliste qu’il a été, sa fine connaissance de l’œuvre de Drieu La Rochelle, ses récits maritimes, et ce magnifique travail d’exploration de la littérature moderne, à travers sa série « Que lire ? », qui comporte neuf tomes, publiés entre 1994 et 2014.

« Ne marche pas trop vite. Attends-moi »

Sa dernière chronique littéraire, dans cette collection, était consacrée à l’écrivain et guerrier Christian de La Mazière, qui était son ami. Elle fut publiée le 16 mars 2006, quelques jours avant son décès. Et son article se terminait par ces mots, qui nous serrent la gorge, même relus dix ans plus tard : « Salut à toi, Bel-Ami de tous les combats. A bientôt. Ne marche pas trop vite. Attends-moi. »

Enfin on peut ne pas se reconnaître du tout dans les passions néo-paganistes de Jean Mabire, mais Serge de Beketch, par exemple, lui avait rendu hommage en ces termes bien trouvés, à sa mort : « Tout de vraie noblesse, bourré d’humour, fin comme l’ambre, désintéressé, il fut un artisan, un travailleur infatigable d’une extraordinaire fidélité en amitié et en admirations. Il n’était ni catholique ni de droite, mais il avait toutes les qualités que l’on voudrait aux gens de droite qui se prétendent catholiques et aux catholiques qui se disent de droite. »

Mabire, par Patrice Mongondry, éd. Pardès, coll. « Qui suis-je ? », 126 p., 60 photos et illustrations, mai 2018.

 

 

Françis Bergeron – Présent

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