Par Alain Sanders
Souvent occultée par les bandes dessinées américaines et belges, la BD britannique mérite vraiment d’être (re)découverte. On peut commencer à le faire grâce à un gros recueil (800 pages) qui regroupe douze des meilleures histoires du magazine Commando sur le Jour-J : D-Day. A l’assaut de la forteresse Europe.
Le premier numéro de Commando est sorti en juillet 1961. Un vétéran des illustrés en Grande-Bretagne à l’époque des War, Air Ace, et autres Battle ? Oui. Avec cette précision que ce vétéran n’a toujours pas posé son sac et qu’il continue d’exister quand tant d’autres ont disparu. A ce jour, Commando a plus de 500 numéros au compteur !
Souvenons-nous qu’en France, dans les années soixante, soixante-dix, nous eûmes, grâce aux éditions Imperia et Aredit, de beaux comics en noir et blanc : Panache,Attack, Tora, Sergent Guam, Rangers, Rapaces, l’excellent Battler Britton, Choc, Feu (on retrouvait dans ces deux titres les aventures du sergent Fury et de ses Commandos hurleurs), Kamikaze, Banzaï, Hardy, Wham.
Et même, chez Artima, Commando, paru en 1959, soit deux ans avant son homonyme britannique. Ce Commando frenchy était nourri d’histoires américaines ou britanniques (dont celles du Commando british à partir de 1961). Il a cessé de paraître en juillet 1987 après 312 numéros réguliers et 17 spéciaux.
Préfacier de ce D-Day commémoratif, Jean-Marc Laîné indique : « Populaire au-delà du culte, Commando jouit, depuis 2005, d’une série de rééditions, dans un format agrandi, par l’éditeur Carlton Books, sous le label Seven Oaks. Ces volumes, de plus de 650 pages chacun, compilent des aventures regroupées par thématique. »
A ses débuts, Commando eut jusqu’à huit, voire douze numéros sortant le même mois ! Inutile de dire qu’il fallait quasiment des centaines de scénaristes et de dessinateurs stakhanovistes pour tenir le rythme et remplir les cases.
« Très tôt, rappelle Jean-Marc Laîné, les éditeurs ont recours à des auteurs étrangers, bien souvent espagnols ou italiens. » Des débutants, des tâcherons qui, pour certains, vont devenir des stars : Hugo Pratt, José Ortiz, Jodi Bernet, Dino Battaglia, Horacio Altuna, Victor de La Fuente…
Après publication, les éditeurs se débarrassaient des planches originales considérées comme encombrantes ! D’où la perte inestimable d’œuvres de jeunesse de ces auteurs aujourd’hui révérés. Indigné d’un tel manque de respect, Victor de La Fuente fera plusieurs fois le voyage Madrid-Londres et retour pour récupérer ses dessins et ceux de ses collègues, sauvant ainsi des petits trésors voués à la corbeille à papiers.
Commando : du nom de ces spécialistes des armées américaines et britanniques qui, pour préparer le Débarquement, s’attaquent à la forteresse Europe. Experts en sabotage, ils sont envoyés derrière les lignes ennemies pour détruire des cibles stratégiques. Beaucoup ne reviendront pas de ces missions à hauts risques.
« Embuscade à l’aube », « La batterie », « Saut sur la Normandie », « Le sang des héros », « Les Diables rouges », etc., autant d’aventures dans l’esprit même de ce que disait Eisenhower : « Lorsque vous faites usage de la force, il est une chose à ne jamais faire : perdre. »
Editions Pierre de Taillac, 13, rue des Tamaris, 14 640 Villers-sur-Mer.