Le prix Nobel de littérature turc Orhan Pamuk stigmatise la politique de la terreur instaurée par le régime et les répressions contre l’opposition et les journalistes. Dans une interview accordée au quotidien italien La Repubblica, le célèbre écrivain turc Orhan Pamuk, plusieurs fois menacé pour avoir fait des déclarations sur le génocide des Arméniens et le massacre des Kurdes, n’a pas mâché ses mots.
L’écrivain est revenu sur les déclarations du président turc Recep Tayyip Erdogan, qui accuse des intellectuels de l’avoir insulté. “Personne n’insulte le chef de l’Etat. Ce qui est en cause, c’est son intention de réduire au silence l’opposition politique et de réprimer la liberté de pensée. Il s’agit de l’intimidation de la population et du pays. Il s’agit d’interdire à quiconque de critiquer le gouvernement”, a-t-il martelé.
Orhan Pamuk ne craint pas pour sa vie. Toutefois, il avoue avoir peur pour son pays, pour ses amis, pour les Turcs laïcs, cultivés et pro-européens.
“La liberté de la presse m’inquiète fort. J’ai peur pour les journalistes qui critiquent le gouvernement et qui sont menacés, licenciés. On ferme leurs journaux. Ces dernières années, notre gouvernement pro-islamique perd graduellement son image libérale. L’Etat devient de plus en plus autoritaire et répressif”, signale l’écrivain.
Force est de constater que ses craintes ne sont pas gratuites. CNN Turk rapporte que l’agence Cihan, le journal Zaman et la chaîne de télévision Küre TV, placés sous tutelle judiciaire, seront fermés à partir du 15 mai prochain sur décision de l’administrateur chargé de leur direction.
L’agence Cihan, qui a commencé ses activités en 1994, s’est imposée comme l’une des plus importantes agences privées turques. Elle comptait plus de 200 bureaux en Turquie et dans plusieurs dizaines de pays et était l’un des principaux fournisseurs de textes, de vidéos et de photos pour les médias turcs et étrangers.
Le journal Zaman paraît depuis 1986. En 2011, il était tiré à un million d’exemplaires. Le journal était diffusé à l’étranger. Ses critiques violentes contre le gouvernement turc ont valu à ses journalistes des poursuites judiciaires pour activité antigouvernementale.