Le 1er septembre, je recevais un mail d’une consœur qui me disait combien les professionnels de santé vont mal moralement et sont découragés. Ce même jour, un article sur France Info faisait écho au mail de ma consœur, parlant du taux alarmant de suicides parmi les infirmiers : l’article disait : « Depuis le mois de juin, cinq infirmières ou infirmiers se sont suicidés en France… Et trois d’entre eux ont clairement laissé des lettres mettant en cause leurs conditions de travail. Ces événements tragiques seraient révélateurs de la grande souffrance de cette profession, souvent passée sous silence. »
Le courriel de ma consœur était tout aussi alarmant. Elle écrit : « Avec un taux de suicide qui ne cesse d’augmenter, les Français surendettés et un État qui en demande toujours et encore plus, [nous observons] de réelles pathologies psychiques et physiologiques, les cabinets médicaux ne se désemplissent pas, et ces derniers à leur tour sont accusés à tort par une augmentation “inhabituelle” de leurs consultations. »
Et c’est là qu’on en arrive au surréalisme : « L’État ne manque pas de zèle et inflige des contrôles médicaux lourds, puisque selon leur logiciel, ces augmentations d’actes effectués ne correspondent pas à l’activité dudit cabinet et ordonne ou provoque des baisses d’activité. […] Ces cabinets médicaux considérés comme des petites entreprises soumises à toutes les augmentations de taxes et impôts, tenus par des hommes et femmes qui portent en eux leurs propres chagrins et difficultés sans mot dire, à l’écoute de leurs patients, absorbent leur douleurs pour les soulager, mais ces professionnels ont leur limite à la résistance, car ils sont humains… La profession médicale sous pression de toute part suffoque et se meurt et se laisse assassiner. »
Traduisons. Il y a un malaise général : de plus en plus de patients n’arrivent plus à joindre les deux bouts, craignent le chômage, et consultent pour mal-être, fruit de la situation actuelle. Et la Sécu, juge et partie, estime bien sûr sans remise en question que ce sont les médecins qui abusent et font gonfler leurs actes.
Un dentiste m’écrit : « Hormis que nous avons de plus en plus de travail administratif, la dernière invention de la CPAM (Caisse primaire d’assurance maladie) était la modification de la nomenclature chez les chirurgiens-dentistes, qui nous a obligés à changer tous nos matériels informatiques (frais à notre charge), qui nous a apporté des bugs informatiques sur les anciens dossiers entre autres dysfonctionnements, les chirurgiens-dentistes sont bien sûr responsables de toutes les anomalies informatiques cachées ou invisibles… alors que les logiciels ont été approuvés par la CPAM ! C’est à croire que tout est volontaire pour nous empêcher de nous concentrer et travailler sereinement pour ceux pour quoi nous sommes formés initialement ! »
Dévalorisation du travail, besoins accrus de soins accompagnés du devoir moral de soulager nos patients, et flicage par la Sécurité sociale qui, d’après divers témoignages concordants, se conduit en véritable Stasi ! À ce rythme, les Français ne trouveront bientôt plus ni dentistes (et deviendront au sens propre des sans-dents), ni médecins, ni infirmiers.