On s’aperçut d’une manière fortuite dans les années 1970 qu’un gisement d’uranium du Gabon, exploité pour sa teneur en uranium particulièrement riche, avait fonctionné comme un réacteur nucléaire il y a deux milliards d’années. Des clients soviétiques s’étant plaints d’une livraison de minerai appauvri en uranium-235, la qualité des livraisons et l’honneur du Commissariat à l’Énergie Atomique étaient en jeu. Des spécialistes furent envoyés sur le site. On se rendit compte de variations importantes des teneurs isotopiques d’un endroit à l’autre du gisement. Des variations surprenantes, car la teneur d’un isotope est sur terre en principe, indépendante du minerai.
En raison de sa période six fois plus courte que celle de l’isotope 238 majoritaire, la concentration de l’uranium-235 a diminué avec le temps. Il y a deux milliards d’années, un minerai d’uranium contenait environ 3,5 % d’isotope 235, c’est-à-dire une concentration voisine de celle du combustible enrichi d’un réacteur nucléaire moderne, si bien que le gisement d’uranium d’Oklo au Gabon a pu fonctionner comme un réacteur moyennant un environnement favorable. De l’eau a joué le rôle de modérateur.
Ces réacteurs naturels – dont plusieurs ont fonctionné sur le site – ne sauraient être comparés à leurs homologues construits par l’homme qui tournent à pleine puissance pendant quelques décennies. À Oklo, les réactions de fission se sont produites au ralenti pendant près de 100 000 ans, comme un feu qui couve.
Le site d’Oklo offre un exemple unique de stockage naturel des résidus d’un cœur de réacteur. Des analyses fines montrent la présence dans les filons de traces fossiles de déchets radioactifs restés sur place et un minerai d’uranium appauvri en uranium-235.