L’Homme nouveau
Par Stéphen Vallet
Le régime fasciste de Mussolini avait donné son accord à la construction d’une mosquée à Rome. C’est ce que « révèle » le journal du comte Ciano, gendre du dictateur italien et ministre des Affaires étrangères du régime jusqu’en 1943. Ce Journal, qui s’étend de 1939 à 1943 dans sa version traduite en français, vient d’être réédité par les éditions La Baconnière et les éditions Payot, avec une préface de Pierre Milza. En ce sens, il ne s’agit pas d’une réelle révélation, mais la lecture ou la relecture de ce Journal permet de mieux connaître la politique fasciste vis-à-vis de l’islam ainsi que la réaction catholique, exprimée alors par le Vatican.
Refus catholique
En date du 11 avril 1939, le comte Galeazzo Ciano écrit dans son Journal :
« Je communique à Pignatti (ambassadeur italien auprès du Saint-Siège, ndlr) la décision du Duce d’ériger une mosquée à Rome, vu qu’il y a maintenant près de six millions de sujets italiens musulmans. Pignatti me rapporte, après en avoir parlé avec Maglione (le Secrétaire d’État de Pie XII, ndlr), que le Vatican est consterné de cette idée, qui est contraire à l’article premier du Concordat. Mais le Duce a pris sa décision et il est appuyé par le roi, qui a été souvent partisan d’une politique anticléricale. »
Une volonté anticléricale
À en croire Ciano, l’idée d’une construction d’une mosquée vient de Benito Mussolini lui-même, soutenu par le roi, fidèle en cela à la politique anticléricale de la Maison de Savoie. À l’époque, l’Église catholique a réagi fermement contre cette éventualité, défendant le fait que le catholicisme était religion officielle de l’Italie. Les Accords du Latran, qui ont rétabli les relations entre l’Italie et le Saint-Siège en 1929, débutent, en effet, par l’invocation « Au nom de la Sainte Trinité » et stipulent dans leur article premier :
« L’Italie reconnaît et réaffirme le principe consacré dans l’article premier du statut du royaume en date du 4 mars 1848, en vertu duquel la religion catholique, apostolique et romaine, est la seule religion de l’État. »
Datant de 1939, cette réaction de l’Église ne prend évidemment pas en compte l’évolution doctrinale introduite par le concile Vatican II sur la liberté religieuse et elle est alors conforme avec la doctrine traditionnelle de l’Église en la matière.
La grande mosquée de Rome, la plus grande d’Italie et d’Europe, a été construite finalement entre 1974 et 1984 et financée par l’Arabie Saoudite.