La ministre de la Justice Nicole Belloubet a choisi Rémy Heitz, magistrat à la longue carrière et délégué interministériel pour remplacer François Molins, figure de l’antiterrorisme français, au poste délicat de procureur de la République de Paris.(…)
Une carrière entre parquets et ministères
Rémy Heitz assurait jusqu’ici la liaison entre la garde des Sceaux et les parquets de France, et l’application des décisions gouvernementales en matière de justice, dont il signait les circulaires. Il se chargeait aussi de gérer la remontée de milliers d’informations des dossiers sensibles issus des parquets de France.
La magistrat de bientôt 56 ans présente une carrière éclectique qui l’a conduit des parquets aux cabinets ministériels. Il va quitter les fonctions qu’il occupait depuis un peu plus d’un an, mais avait fait son entrée à la DACG (Direction des affaires criminelles et des grâces) dès 1992, pour y revenir à la fin des années 1990 en tant que chef du bureau de l’action publique.
Rémy Heitz a fait ses premiers pas en politique en tant que chef de cabinet de Pascal Clément (UMP), à l’époque ministre délégué aux Relations avec l’Assemblée nationale. Puis il est entré au cabinet de Jean-Pierre Raffarin en 2002 en tant que conseiller technique chargé de la justice. Sous la présidence de Jacques Chirac, il a été nommé délégué interministériel à la sécurité routière entre 2003 et 2006. La France lui doit le suivi du chantier de l’implantation des radars qui lui a valu le surnom de «Monsieur sécurité routière».
Sa carrière d’envergure dans la magistrature a débuté lorsqu’il a pris les fonctions de procureur de la République de Saint-Malo de 1999 à 2001, l’année qui le verra devenir vice-procureur au tribunal de grande instance de Paris. Il a pris la tête du tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis), le deuxième plus grand de France, entre 2011 et 2015. Rémy Heitz deviendra à la suite premier président de la cour d’appel de Colmar pendant près de deux ans, où s’est mis en place un programme de prévention de la radicalisation violente.
L’Elysée accusé de s’immiscer dans cette nomination
La nomination de Rémy Heitz intervient après maints atermoiements du pouvoir qui a rejeté plusieurs candidatures de la chancellerie. L’Elysée a été accusé à ce propos de vouloir s’ingérer dans le pouvoir judiciaire. Le 26 septembre, Le Canard enchaîné avait affirmé qu’Emmanuel Macron avait «biffé les noms des trois candidats au poste de procureur de Paris, poste stratégique s’il en est», pourtant retenus par la chancellerie : Maryvonne Caillibotte, avocate générale à Paris, Marie-Suzanne Le Quéau, procureure générale de Douai, et Marc Cimamonti, procureur de Lyon. Un nouvel appel à candidatures avait été lancé le 24 juillet, froissant le monde des magistrats. Sa proximité avec la ministre de la Justice est perçue comme l’argument décisif dans le choix retenu.