Jérôme Bosch, célèbre peintre flamand de la Renaissance, reprend le thème de la « Nef des fous » pour brosser un saisissant tableau qui met en scène une bande de joyeux lurons avinés faisant bombance sur une frêle embarcation. Cette « Nef des fous », composée sur le mode de l’allégorie, pointe du doigt la dérive de nos cités privées de raison dans un contexte où les élites ont perdu tout sens de l’orientation alors que l’ordre public a été réduit à néant. Certains historiens de l’art ont voulu y voir une critique mordante du bas clergé, à une époque où l’Église se préoccupait plus de ses juteuses prébendes que du salut des âmes.
De nos jours, comme l’Histoire aime à se répéter, il est à craindre que nos élites aient de nouveau perdu le sens de l’orientation. C’est ainsi que la théorie du genre – ou gender – représente l’évangile d’une postmodernité qui ambitionne d’araser toutes les différences qui fondaient le genre humain : linguistiques, sexuelles, culturelles ou civilisationnelles. Les marchés financiers tenant lieu de boussole, nos dirigeants naviguent entre les écueils des nombreux lobbies qui menacent de briser la coque de nos États moribonds qui ne servent plus qu’à alimenter la gamelle de l’oligarchie maquerelle aux manettes.
Le gouvernement du Premier ministre Justin Trudeau semble prendre un plaisir fou à cette danse macabre alors que l’état-major des armées canadiennes participait, le dimanche 27 août dernier, à la Gay Pride d’Ottawa. Ainsi, donc, suite au cortège des politiciens (représentant les laboratores), voilà que nos chefs de guerre (bellatores) rejoignent les rangs de cette joyeuse ribambelle de pénitents venus faire amende honorable à une rectitude politique qui tient lieu de catéchisme. Voguant à contre-courant de l’administration Trump, la nef canadienne dérive sur les eaux troubles d’un océan communautariste qui a, depuis longtemps, dissous toute trace d’esprit civique au nord de l’empire yankee. Le chef d’état-major de la Défense, Jonathan Vance, y est allé de ses exhortations en nous rappelant : « Les trans dans les forces armées canadiennes, je les encourage à rester avec nous. Pensez à une carrière dans les forces armées canadiennes. »
Ainsi, donc, l’esprit de transgression souffle là où il veut, c’est-à-dire vers les écueils d’une diversité factice qui ne sert qu’à berner les simples d’esprit à l’heure où les saints évangiles du gender, des migrations intempestives, des marchés financiers et du nouveau désordre mondial tiennent lieu de Codex illuminatus. Désorientées, nos élites autoproclamées se pavanent sur des chars allégoriques en se trémoussant devant la foule des payeurs de taxes et des travailleurs de cette nouvelle économie où la spéculation menace jusqu’au ventre des femmes enceintes. Quoi qu’il en soit, que les congrégations féministes se consolent : bientôt, les fœtus seront nourris dans de gigantesques parcs gérés par les bons bergers de la reproduction du cheptel humanoïde. Le genre humain aura vécu et notre Terre-Mère sera, enfin, délivrée de l’engeance chrétienne.
Nouvelle Babylone des temps modernes, le Canada montre la voie à suivre et il ne manque plus que la venue d’un ecclésiastique afin que soit consacré un nouveau char allégorique dédié à notre mère l’Église (oratores). Le désordre ainsi rétabli, le funeste cortège pourra s’ébranler, avec à sa tête l’ecclésiastique et la Femen, tous les deux juchés sur d’immenses cothurnes et portant des tenues suggestives, vers les lendemains radieux qui pointent sur l’horizon de cette lassitude écœurante qui gagne les restes de la société humaine.
Notre homme tiendra, dans sa main droite, un fouet, en guise de crosse, afin de battre sa coulpe et celle de sa Femen complice, histoire de rappeler aux moutons de Panurge leur devoir premier. Celui de perdre jusqu’à la mémoire de leurs origines.
Patrice-Hans Perrier – Boulevard Voltaire