Les divisions du Pape de Frédéric Le Moal

Longtemps décriée, l’action du Saint-Siège face au nazisme et au communisme est revalorisée par un brillant historien. En dépit de leur valeur inégale, les livres consacrés au pape Pie XII pendant la Seconde Guerre mondiale constituent régulièrement des succès de librairie. En revanche, ceux étudiant les rapports entre l’Église et le communisme sont plus rares. Ils ne sont pas pour autant dénués d’intérêt. En outre, à notre connaissance, il n’existe aucun ouvrage abordant l’action du Saint-Siège face aux totalitarismes du XXe siècle dans leur ensemble. En effet, pendant très longtemps, mettre sur un pied d’égalité le génocide des races et le génocide des classes provoquait une levée de boucliers du politiquement correct : la légende du parti des soixante quinze mille fusillés rendait le communisme intouchable. Pourtant, on ne dira jamais assez que nazisme et communisme, ces « religions séculières » (Raymond Aron), possèdent les mêmes racines idéologiques. Ils ont aussi en commun la haine du catholicisme.

C’est ce que rappelle opportunément Frédéric Le Moal dans une synthèse historique remarquable, consacrée à l’action du Saint-Siège face aux dictatures totalitaires de 1917 à 1989. Cette approche globale inédite révèle toute la difficulté qu’eut le pouvoir pontifical à répondre au mieux à une situation, avec sa seule force morale. On reproche souvent au Saint-Siège son attentisme, voire sa complaisance. Mais l’art de l’historien est de se replacer dans le contexte de l’époque. C’est ce que fait ici notre auteur qui présente la politique du Vatican mêlant une lutte ouverte et une action en clair- obscur, à la recherche de la « moins mauvaise des solutions ». Avec néanmoins un seul et même objectif : sauver ce qui pouvait l’être.

Le Moal prend le contre-pied de toute une historio-graphie qui, pendant des décennies, n’a pas épargné le chef de l’Église catholique. Pourtant, sur le temps long, l’Église apparaît comme un des éléments essentiels ayant provoqué la chute des totalitarismes. Grâce notamment à une vertu dont on parle tant de nos jours face au péril islamiste : l’espérance.

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