A la suite d’une tempête en mer, un jeune homme échoue miraculeusement sur la plage d’une île déserte où il entreprend de construire un radeau pour rallier la civilisation. Mais quand il prend la mer sur son embarcation de fortune, celle-ci est aussitôt détruite par la tortue du titre. Et la scène de se répéter jusqu’à déclencher chez le naufragé une fureur meurtrière aux conséquences pour le moins surpenantes : dans la carapace de la bête laissée pour morte sur le sable, repose le corps immaculé d’une femme. On nage en plein délire en somme, mais tout semble couler de source, à l’image de cet enfant arrivé avec le vent.
Comme les chefs-d’œuvre du Studio Ghibli (Le Tombeau des lucioles, Le Voyage de Chihiro, Le Château ambulant), dont c’est la première incursion en Europe, La Tortue rouge est animé par un souci écologique et un rapport poétique aux éléments. Mais là où Miyazaki, par exemple, s’illustre en général au travers d’un bestiaire foisonnant et d’une succession de métamorphoses, Michael Dudok de Wit s’épanouit dans l’épure et l’ellipse. La Tortue rouge est un modèle de clarté graphique et d’animation lumineuse. Il ne s’y passe rien ou presque, mais c’est toute une vie qui se déroule sous nos yeux avec une fluidité étourdissante.