Dans son blog en date du 1er juillet, le journal Le Monde donnait en exemple ces Canadiens qui sont plus catholiques que le pape lorsqu’il s’agit d’accueillir les réfugiés. Rappel : le Canada dispose d’un système dit « de parrainage » des étrangers, né d’une époque irénique qui reposait sur le sens de la famille, sur la confiance et sur les responsabilités partagées. Dans le cas du parrainage familial, les familles apportent au gouvernement des garanties morales comme financières sur le nouveau venu. Dans le deuxième cas, le parrainage des réfugiés, ce sont simplement des groupes privés de citoyens qui procèdent de même.
Et Le Monde d’expliquer : « Après son élection en octobre 2015, le Premier ministre, Justin Trudeau, s’était engagé à accueillir 25.000 hommes, femmes et enfants avant la fin de l’année 2015. Le chiffre a, depuis, gonflé de plusieurs dizaines de milliers de personnes. » Mais le journal cite ensuite les regrets du « débordé » ministre de l’Immigration canadien, John McCallum : « Je ne peux pas fournir assez de réfugiés pour tous les Canadiens qui veulent devenir sponsors ! »
Qui sont ces « groupes privés de citoyens » si dynamiques ? Citoyenneté et Immigration Canada distingue plusieurs cas de parrains. D’abord les signataires d’une entente de parrainage (SEP) : « Actuellement, les SEP sont surtout des organismes religieux, des groupes ethnoculturels ou des organismes humanitaires. » Puis viennent les groupes constitutifs (GC), qui sont en fait des sous-groupes régionaux des SEP : « Les groupes constitutifs […] doivent faire approuver par le SEP leurs demandes de parrainage et le plan d’établissement. » Ce n’est pas tout, car il y a ensuite les groupes de cinq (G5) : « Ces groupes sont composés de cinq particuliers ou plus, citoyens canadiens ou résidents permanents, âgés d’au moins 18 ans, qui demeurent dans la localité où le réfugié est censé s’établir et qui s’organisent ensemble pour parrainer un réfugié vivant à l’étranger. » Sans oublier le dessert, avec les répondants communautaires (RC) : « Toute organisation (à but lucratif ou sans but lucratif, constituée en société ou non) établie dans la collectivité où le réfugié doit s’installer peut remplir un engagement de parrainage. »
Telle est la panoplie du quadrillage qui pourrait permettre à des groupes religieux hégémonistes de transformer le Canada en sanctuaire du terrorisme. Surprise : les Canadiens ne semblent pas aussi enthousiastes que leurs élites. En février dernier, 70 % d’entre eux considéraient trop élevés les objectifs du gouvernement concernant l’accueil des réfugiés (National Post). Cela importe-t-il ?
Laissons le mot de la fin à l’ancien ministre du Parti québécois Joseph Facal : « Je me souviens d’une chroniqueuse de La Presse qui, pendant que l’on débattait de l’opportunité d’accueillir plus ou moins de migrants syriens, se réjouissait à l’avance de visiter tous ces charmants restos ethniques qui allaient fleurir à Montréal. D’autres, ici ou dans les grandes villes européennes, n’ont pas notre chance… Certains beaux esprits, qui arborent leur petite morale bien-pensante comme d’autres montrent leurs médailles, ne vivraient pas une semaine dans certains quartiers de Montréal, de Paris, de Londres ou de Bruxelles. Ceux-là, installés confortablement, déversent leur mépris sur les primitifs qui n’ont pas leur “ouverture” à l’Autre » (Journal de Montréal, 2 juillet 2016).
Andre Archambaud – Boulevard Voltaire