Pour éviter une grève, sans doute, la direction d’Air France accède à la demande de ses personnels féminins : seules assureront le service vers Téhéran à partir du 17 avril prochain les femmes volontaires. Toutes les autres auront la possibilité de refuser, cela « sans conséquence sur leur salaire ou leur planning ».
Donc, les vols Air France vont reprendre dans quinze jours vers le pays des mollahs. Et comme le veulent la loi et les coutumes en matière aérienne, « les équipages sont évidemment tenus de respecter la loi du pays dans lequel ils se trouvent ». En vertu de quoi la compagnie nationale demande aux hôtesses ou pilotes femmes qui feront la liaison de bien vouloir porter « un pantalon, une veste longue et surtout d’utiliser le foulard de [leur] uniforme en le portant en voile à l’arrivée à Téhéran ». Une intolérable contrainte… qui serait toutefois passée inaperçue, comme le souligne Le Figaro, si les médias offusqués ne s’étaient emparés de la consigne pour battre le tam-tam.
Dans un temps où lesdits médias s’enthousiasment devant « les marques [qui] se mettent à la mode islamique », comme le rappelait ici il y a quelques jours mon amie Gabrielle Cluzel, l’histoire ne manque pas de piment. En effet, les mêmes qui se félicitent qu’on puisse acheter son burkini, son hijab ou son abaya griffés chez H&M ou Marks & Spencer dénoncent l’insupportable coercition qui serait exercée par Air France envers ses employées.
Alors, la trouille au ventre – et surtout la trouille d’une possible grève en ces jours de vacances de printemps -, la compagnie a jeté le voile avant même de l’avoir coiffé. Et son DRH Gilles Gateau a réuni lundi après-midi les syndicats pour annoncer la « mise en place d’un dispositif d’exception qui permettra que toute femme qui serait affectée sur le vol Paris-Téhéran et qui, pour des raisons de choix personnels, refuserait de porter le foulard à la sortie de l’avion, serait réaffectée sur un autre vol, sur une autre destination, donc ne serait pas dans l’obligation de faire ce vol sur Téhéran ». Une procédure déjà mise en place, rappelle-t-il, concernant les vols pour Conakry en raison du risque Ebola, et Tokyo après Fukushima !
Compte tenu de la comparaison, on se demande s’il ne faudrait pas aussi filer à ces dames une petite prime pour souffrance morale. Car, comme le dit M. Gateau – qui aurait pu aussi s’appeler bonne poire -, « là, on voit bien qu’il y a un problème particulier, une sensibilité particulière ».
L’intolérable, disent les syndicats, est qu’on demande aux femmes de poser leur foulard sur la tête à la descente d’avion. « Dans aucun autre pays desservi par notre réseau, assure le président de l’Union des navigants de l’aviation civile, nous n’avons de contrainte vestimentaire entre la sortie de l’avion et la chambre d’hôtel. » Mais comme Air France accorde des temps de repos comme aucune autre compagnie au monde, les équipages en profitent pour faire un peu de tourisme. À Riyad, par exemple, où « à la sortie de l’aéroport, les femmes sont tout de même obligées de porter l’abaya ».
Vous savez quoi ? Il n’y a qu’en France où l’on n’oblige personne à respecter la loi, celle des interdits ou des obligations vestimentaires. Je fréquente parfois une école de Montreuil où sont exilés quelques petits Franco-Français au nom de la carte scolaire et de la mixité sociale : on y compte, comme au marché voisin, huit femmes voilées pour une qui ne l’est pas.