La digiphrenia des Millenials!

Millennials, digital natives, génération Y, ou encore “WE-I génération” selon Peclers Paris : autant d’appellations pour ceux qui sont nés entre les années 1980 et 2000 et qu’on dit être la génération la plus importante depuis les baby-boomers.  Aujourd’hui, ces 15-34 ans sont près de 16 millions en France, selon l’INSEE, soit un quart de la population française. S’ils représentent aujourd’hui 1/3 des actifs, ils constitueront la moitié de la population active d’ici 2020. Les Etats-Unis comptent 80 millions de Millenials, quand la Chine en dénombre 364 millions.

Une ouverture sur un monde en réseau
Hyperconnectés, les 15-34 vivent au quotidien une expérience globale de l’information et de la culture et sont manière générale plus équipés que leurs aînés de la génération X (5-10% de plus).

S’ils sont souvent considérés comme tournés vers eux-mêmes, il faut bien prendre en compte le fait que leur présumé individualisme fait toujours partie d’une logique de réseau, d’où l’appellation de « WE-I Generation ». Ils entretiennent alors un nouveau rapport à autrui : motivés par le multiculturalisme, ils véhiculent des valeurs d’ouverture et de partage, à travers notamment le développement du collaboratif – qu’il s’agisse de plateformes de crowfunding ou d’espaces de co-working, par exemple.

L’ouverture sur une plus grande diversité culturelle se traduit par le développement de sous-cultures issues du croisement et de la réappropriation des codes culturels traditionnels et des références pop, à l’instar du street-art. Cette diversité culturelle brassée, remixée, vise à embrasser la modernité tout en préservant les traditions, référent culturel primordial pour ces nouveaux codes hybrides qui constituent ce qu’on appelle le « glocal ».

L’importance des enjeux numériques : pour une innovation éthique
Peut-être parce qu’elle a grandi dans un contexte de crise, cette génération a développé un esprit pragmatique de débrouillardise, bien incarnée par le jugaad spirit, cet esprit d’innovation frugal et ingénieux venu d’Inde qui émerge de situations hostiles. Les Millennials auraient décidé de prendre leur destin en main, afin d’échapper au constat de morosité contemporaine. Seulement cette énergie créatrice low cost se dote aussi d’une connotation éthique importante : les innovations doivent être mises au service de valeurs sociales. Autant que les nouveautés, les travaux de remixage et de recyclage doivent être pensés afin de bénéficier à la communauté.

De même, la génération des digital natives se sent plus concernée par les questions de libertés numériques, et notamment de respect de la vie privée, qui passe en premier lieu par la protection des données et la problématique de l’anonymat. Outre l’enjeu de surveillance, celui de la défense d’un Internet libre, non censuré motive les Millennials à avoir un regard moins manichéen sur le piratage, et à célébrer les hackers comme des héros. Présidente des jeunes pirates allemands de 2010 à 2012, et aujourd’hui députée européenne à seulement 27 ans, Julia Reda témoigne de l’importance des enjeux numériques pour les jeunes.

Un esprit d’aventure comme réaction à la “digiphrenia”
Enfin, cette génération qui évolue dans un environnement mêlant en permanence virtuel et réel jusqu’à les fusionner, a aussi besoin de se garder un bouton off qui lui permette de s’offrir des moments de déconnexion. En quête de ralentissement et de havre de paix, cette détox digitale passe par des initiatives telles que la journée nationale de déconnexion, qui a lieu en mars depuis déjà cinq ans.
Mais pour se détacher de la distorsion de la réalité qu’opère le virtuel, les jeunes sont aussi attirés par l’aventure incarnée par les grands espaces naturels, et ce afin de renouer avec “l’authentique” et avec “l’instant”. Si cet esprit aventureux puise certainement dans l’ouverture d’esprit et le nomadisme qui caractérisent vraisemblablement cette génération, elle est aussi une réaction aux maux de nos sociétés contemporaines.

La soif d’aventure peut alors être envisagée comme une réaction à la “digiphrenia”, cette surcharge d’informations propre à notre ère digitale. L’ailleurs et la quête de l’aléatoire qui y est associée serait alors une sorte d’exutoire collectif où pourrait se réaliser, plus et mieux encore qu’à travers le happy networking et la joie virale, un idéal d’agora à travers simplicité et solidarité. En témoignent le succès de concepts comme le couchsurfing, ou plus récemment d’Airbnb.

Derrière cette envie de serendipité nomadique, il y a la volonté de laisser place à l’empathie : c’est bel et bien l’expérience qui prime. Imprégnés par le « more with less » et promouvant une forme d’hédonisme, les Millennials veulent retrouver ce simple moment de convivialité partagé, aboutissement de leur quête de mieux-être et de libération de soi.

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