Mes chers confrères « papis »,
Chaque année revient la délicieuse angoisse de réussir le choix des cadeaux « pèrenoëlisés » pour nos petits-enfants. Cette année, soyez sûrs de réussir cette difficile épreuve en leur offrant des DVD de Masha et Michka. En français ou dans la langue qu’ils étudient à l’école.
Ces animations russes, remarquablement réussies, sont à visionner à plusieurs degrés. Au premier coup d’œil, il ne s’agit que d’un charmant divertissement pour enfants : une adorable, espiègle (et un peu épuisante), toute petite fille qui découvre dans la taïga l’isba artisanale d’un vieil ours retraité du cirque, débonnaire et heureux de cultiver ses potirons, élever ses abeilles (bien sûr), boire du thé, regarder des matchs à la télé, pêcher à la ligne et demeurer amoureux transi d’une superbe et très ursidée créature.
Pourtant, il y a d’autres niveaux de visionnage de ces petits chefs-d’œuvre. Que mes confrères « papis » verront avec jubilation tout en préservant la posture digne du grand-père exemplaire qui subit stoïquement le visionnage patient avec les chères têtes blondes ou brunes. Il y a un humour post-soviétique décalé qui passerait inaperçu : par exemple, la maison du garde-barrière qui se trouve de l’autre côté de la voie ferrée, mais dans une impasse ! Il y a aussi les contes à dormir debout que Masha raconte à ses poupées, les tentatives infructueuses de Michka pour préserver sa tranquillité face à cette mini-tornade, qui vous rappellera sans nul doute l’insatiable activité de vos propres petits-enfants.
Le Dr. Freud aurait même peut-être décelé, sous l’historiette, des allusions au rapport homme/femme en Russie. Masha, qui porte le traditionnel fichu des babouchkas et des mères de famille, est active et directive, voire autoritaire, mais maternelle, et Michka plus sédentaire et pantouflard.
Enfin, de Masha et Michka on doit tirer une leçon trop longtemps cachée sous la carapace hostile de l’URSS, dont la marque fausse encore notre jugement. Les Russes apparaissent désormais pour ce qu’ils sont : plus proches de notre culture et de notre sensibilité que les USA de Trump. Les dessins animés yankee sont saturés de cris, d’agitation, d’énervements, de brutalité, de gags commerciaux : ils saturent et fatiguent. Ce film russe d’animation est tout de fraîcheur, d’humour, de tendresse. Un charmant divertissement.
Militairement et diplomatiquement, ils sont en train de prendre le premier rôle au Moyen-Orient. Ne devrait-on pas tirer des conséquences géostratégiques de cette proximité, à deux méridiens de distance, contre sept pour les USA ? Lever les ineptes sanctions et enclencher un cercle de coopérations vertueuses entre la France et la Russie ?
« Dobraïa nadejda »* : l’ours ex-soviétique est aussi désormais Michka…
* Joyeux Noël
Henri Temple- Boulevard Voltaire