Le tableau dressé par « Dossier tabou », dimanche soir – « Harcèlement sexuel, les femmes n’en peuvent plus » -, est accablant. Bernard de La Villardière affirme, lors d’une séquence en compagnie de Marlène Schiappa, que « de son temps » les jeunes filles pouvaient se promener en mini-jupe sans se faire importuner. La secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, l’air grave, ne le contredit pas, reconnaît que ce n’était déjà plus le cas pour sa génération et que cela l’est encore moins pour celle qui arrive. Côa ? Est-ce possible ? La société patriarcale pompido-giscardienne qui ne connaissait même pas l’écriture inclusive (autant dire l’âge du silex) était moins oppressante pour la femme que la nôtre ? L’espace public moins hostile ?
Beau succès ! Bravo, les filles, z’êtes championnes ! Mais qu’avez-vous bricolé pendant toutes ces années ? Où sont les progrès, les acquis, ce que l’on peut mettre à votre crédit ? Non contentes de ne pas avancer, vous avez en sus reculé… Qu’ont donc gardé les chiennes de garde si les jeunes filles se sentent moins en sécurité que lorsque les féministes professionnelles n’existaient pas ? Fermer les officines dûment subventionnées eu égard au piètre résultat serait la moindre des choses, non ?
Le cocktail explosif tient tout entier dans ce reportage, même si Bernard de La Villardière ne donne pas d’analyse et se contente de mettre en vrac sur la table : je pose tout là, et vous ferez le tri ! Mais montrer sans se sentir obligé de démontrer, c’est aussi faire honnêtement son travail de journaliste.
Son « Dossier tabou » aurait pu prendre un « s ». Car deux sujets interdits y sont abordés. À ma gauche, l’islamisation croissante. À ma droite, la dérive d’une société libertaire. Au centre, la femme, qui n’y peut mais, prise en étau.
Mais la population allochtone n’est pas la seule en cause, comme le montre le reportage.
Il en est du libéralisme en matière de sexe comme en économie. On a assisté doucettement, en Occident, à une dérégulation des mœurs comme il y a eu une dérégulation des marchés. Foin des circonlocutions, de la cour et du jeu de séduction omniprésent dans la littérature qui sublimait l’instinct et faisait de l’acte sexuel une chose mystérieuse, belle et sacrée (puisqu’il pouvait donner la vie), et pas une activité de plomberie telle qu’envisagée par les adolescents que l’on entend, dans le reportage, poser leurs sordides questions techniques sur Fun Radio, biberonnés dès l’école primaire à une éducation sexuelle triviale et hygiéniste, puis « instruits » par des films pornos visionnés en boucle comme autant d’implicites tutorats. Puisque les femmes sont libérées et coquines – comme le laissent supposer presse féminine et publicité -, les hommes un peu frustes pensent pouvoir y aller « franco ». Pourquoi se gêner, Dédé ?
Et l’islamisme se nourrit de façon mortelle de cette dérive qui lui sert d’appât – « Voyez comme, chez eux, les femmes sont avilies ! » – et notre société libertaire est paralysée face à l’islamisme, car le dénoncer serait une forme de racisme. Elle préfère encore sacrifier la femme, qui finalement, où qu’elle se tourne, qu’on entende la cacher ou la dénuder, n’est plus qu’un objet sexuel. Et s’il fallait TOUT changer ?
Gabrielle Cluzel – Boulevard Voltaire