Par Charles Chaleyat
Avec l’Ukraine*, les Cosaques reviennent à la mode en Occident quoique désormais plutôt négativement étant donnés leur russophilie, leur orthodoxie et leur allégeance à la mère patrie : la Russie comme ils le furent des siècles durant pour finalement intégrer l’armée russe elle-même au XVIIIè siècle et y assurer la garde de l’Empereur. Ils constituèrent un état au XVIIè siècle, dans la partie orientale de l’Ukraine mais, après nombre de soulèvements indépendantistes, la Grande Catherine détruisit en 1755 cet Hetmanat cosaque. Leur caractère indépendant conduisit certains (sous la direction de Makhno) lors de la Révolution de 1917 à combattre et les Rouges et les Blancs.
A l’origine formés de peuples divers (Mongols/Tatars), aux franges de l’Empire russe vers le XVè siècle, les Cosaques, alors considérés comme des mercenaires plus ou moins pillards (à l’image des Varègues qui, à l’Ouest, fondèrent Kiev) se sont finalement majoritairement constitués de Slaves fuyant le servage et le despotisme impérial additionnés de toutes sortes de fugitifs nordiques, polonais en proie à diverses oppressions. Ils avaient pour cela, à défaut des paysans occidentaux, un immense espace libre de toute autorité, à occuper et cultiver : les steppes du sud de la plaine russe et celles de Sibérie, au-delà des frontières impériales russes. Car c’étaient essentiellement des paysans propriétaires armés, formant des communautés autonomes, élisant en réunion (la Rada) leur chef (ataman ou hetman) et établies autour d’un camp fortifié (la siètch/sitch).
La communauté la plus connue, fondée en 1550, fut celle des Cosaques Zaporogues** (signifiant : Cosaques-au-delà-du-seuil du Dniepr) mais d’autres groupes se formèrent sur le Don puis au Kouban, au Terek et, peu à peu passant l’Oural – à l’inverse des invasions asiatiques précédentes (Polovtses, Pétchénègues, Mongols) – ils avancèrent vers l’Est jusqu’à coloniser la totalité de la Sibérie (fondant Tobolsk, Iakoutsk), franchir l’Amour (Cosaques d’Amour), atteindre le Pacifique en 1645 et franchissant le détroit de Behring coloniser l’Alaska puis le Nord de la Californie à la fin du XVIIIè siècle, au contact avec les Espagnols. On ignore en général cette facette de la conquête occidentale de l’Amérique car elle fut brève, les autorités russes décidant la vente des établissements californiens (1841) puis la vente de l’Alaska aux Etats-Unis (1867). Il en reste cependant un souvenir dans la ville de Fort-Ross (de Rossia son ancien nom russe fondée en 1812) à 80km au Nord de San Francisco où la chapelle reconstruite en l’état témoigne de la présence russe ancienne comme l’église de la ville d’Unalaska.
* Ukraïna signifie frontière