Par Charles Chaleyat
Ce hourvari quasi planétaire autour de la mort de Cecil, le magnifique lion du Zimbabwe, laisse pantois. Je suis opposé à la chasse, surtout celle qui permet de tuer sans risque (à la 375 Winchester Magnum ou 416 Rigby avec lunette). J’y suis d’autant opposé que tout le monde connaît la disparition des espèces sauvages, la baisse de la biodiversité, etc. Il me semble tout de même que tout cela a un parfum d’irréalité dans un monde qui croule sous les populations, le bétonnage des espaces c’est-à-dire l’envahissement accéléré (et l’érosion) de TOUS les coins de la planète, au grand détriment des animaux sauvages et bien évidemment, des plus grands et de ceux qui ont besoin d’espaces (éléphants, hippopotames, rhinocéros…). Et dans la liste, on oublie facilement les plus petits qui disparaissent parfois plus vit : singes, lémuriens, nombre d’oiseaux, serpents, batraciens, par la simple modification de leurs biotopes, traduite souvent par l’abattage des forêts.
En Europe, nous n’avons pas vécu la disparition des grands animaux : mammouths, aurochs, élaphes, cheval de Przewalski, lion géant, ours des cavernes… Seul le bison d’Europe a survécu par miracle en Pologne; le loup et l’ours sont depuis revenus au grand dam des bergers… Comment conserver dans un continent qui explose démographiquement, l’Afrique, les mêmes populations animales que jadis ? J’ai vu moi-même disparaître des dans les années 70-80, des zones sauvages (dites ‘vides’) du Nord-Cameroun, peu à peu submergées de villages neufs… D’autant que ces animaux sont tout simplement et unanimement pour les autochtones de la ‘viande’. De l’antilope au babouin ou à la civette, tout est viande pour des gens qui en mangent peu souvent. Quant aux félins, grands ou petits, ce sont, pour les Africains, des nuisibles parfois très dangereux qu’il faut tuer…
Ce fracas médiatique me semble tout autant incongru quand on songe aux millions d’animaux abattus chaque jour dans des conditions bien peu jolies voire brutales (halal) afin que nous continuions à avoir notre côte de bœuf ou notre escalope dans l’assiette. Cette face cachée de nos sociétés, chinoise comprise avec ses goûts ‘exotiques’ (chien, ailerons de requins, etc.) est bien plus cruelle, implacable et gigantesque que la chasse/pêche (grande ou petite, ‘sportive’ ou organisée) qui par ailleurs, sème plombs et cartouches, filets et hameçons, partout dans la nature, tuant au hasard phoques, requins, orques, poissons, polluant les sols, farcissant les troncs d’arbre de plomb et autres saloperies.
A trop voir l’incident, on oublie les massacres sur lesquels repose une alimentation à ce point déréglée qu’il faut importer des nourritures végétales du Brésil (gagnées sur la forêt et les Indiens) pour ‘élever’ toute cette boucherie dont nous nous régalons exagérément.