La baisse des dotations de l’État est au centre de l’actuel congrès des maires de France, alors qu’ils sont confrontés par ailleurs à des charges supplémentaires, comme les conséquences de la réforme des rythmes scolaires. Elles sont nombreuses « en régions » (il paraît que province est devenu une injure), ces villes moyennes où l’on est frappé par le grand écart entre la magnificence des équipements publics et les pauvres moyens des particuliers. Et elles se ressemblent.
Religion écologique oblige, on a banni les voitures : après une demi-douzaine de ronds-points plus fleuris que les serres d’Auteuil ou ornés d’œuvres « contemporaines », prière de se mettre au parking (payant) et d’emprunter des rues piétonnes. Mais alors… luxueusement piétonnes ! Bornes, potelets, poubelles et lampadaires dignes de la FIAC, on croirait accéder au palais de l’émir du Qatar… Sur les trottoirs dallés de porphyre ou de quartzite, deux fauteuils roulants peuvent se croiser sans peine, et il ne manque pas une bande podo-sensible pour malvoyants. On arrive devant une petite église – bien évidemment fermée -, mais où un détecteur à infrarouge déclenche pour vous seul une fugue de Bach !
Sympa, mais on se sent bien seul : on ne croise que de rares indigènes dans ces rues quasi désertes. Certaines sont encore accessibles aux voitures, mais sur une seule voie, et bordée de plots. Se garer brièvement en double file pour prendre une bouteille de propane… même pas en rêve ! Une livraison de piano à queue, c’est une demi-heure de blocage total. Et à onze heure du soir, tout est encore éclairé a giorno par des lampes à sodium tous les trente mètres. Mais surtout, à force de privilégier « les circulations douces, notamment la mise en place de rues et de cheminements piétons qui mettent en valeur le patrimoine et rendent la circulation en centre-ville plus agréable, conviviale et sécurisée », que de boutiques à vendre et de vitrines passées au blanc d’Espagne dans ces rues !
Et regardez les immeubles privés : les façades sont décrépies, les gouttières trouées et les volets de guingois. Visiblement, ces « salauds de propriétaires », eux, ne roulent pas sur l’or. On ne peut pas s’empêcher de penser que ça fait une moyenne avec l’hôtel de ville. Si bien qu’à elles seules, les mairies ont aujourd’hui 65 milliards de dette !
En URSS, trois familles s’entassaient dans 50 m2 tandis que les stations de métro avaient des allures d’Opéra de Paris. Nous sommes sur la même pente typiquement socialiste, grâce à notre délire fiscal. Car la devise de ceux qui gèrent l’argent des autres, c’est « Je dépense, donc je suis ».
Certes, la France est un pays superbe, mais à quel prix ? D’une part, nos administrations, villes, départements et régions ont dépensé sans compter (et à crédit) pour des équipements, certes charmants (mais qui les a vraiment demandés ?) ; d’autre part, nous avons de plus en plus de chômeurs et de clients des Restos du Cœur… N’y aurait-il pas un lien de cause à effet ?