Jean Bellorini, Philippe Torreton, Valérie Dréville, côté théâtre public ; Florian Zeller, Alexis Michalik, Robert Hirsch et Isabelle Gélinas sont les grands gagnants des Molières 2014.
Les Molières de retour après une absence de deux ans… diffusés assez tard, en différé sur France 2. Mais ça fait du bien tout de même de les retrouver, ces Oscars français du théâtre… Aux Folies Bergères, dans une ambiance plutôt sympathique _Nicolas Bedos bien en jambe en maître de cérémonie_ et avec une moisson de prix dignes et consensuels.
Côté public, Jean Bellorini a raflé la mise : Molière du meilleur spectacle pour un spectacle déjà ancien, « Paroles gelées » d’après Rabelais, et Molière de la mise en scène à la fois pour « Paroles gelées » et « La Bonne âme du Se-Tchouan » de Brecht (créé récemment à l’Odéon). Une récompense méritée. Philippe Torreton qui triomphe actuellement dans un « Cyrano » complètement « fou », à la foi âpre et tendre à l’Odéon (mis en scène par Dominique Pitoiset) a gagné le Molière du meilleur comédien. Surprise pour le Molière de la meilleure comédienne, puisque l’excellente Valérie Dréville pour son rôle tragique dans « Les Revenants » d’Ibsen mis en scène par Thomas Ostermeier a coiffé sur le poteau Isabelle Huppert, pourtant éblouissante dans « Les Fausse confidences ».
Côté privé, on a assiste à un triomphe partagé : « Le Père » _la tragi-comédie de Florian Zeller a été trois fois distingué. Molière du meilleur spectacle, Molière du meilleur comédien pour Robert Hirsch, incroyable dans le rôle douloureux du père qui perd la mémoire et Molière de la meilleure comédienne pour Isabelle Gélinas, incarnant sa fille désespérée. Le jeune artiste qui monte Alexis Michalik en a remporté trois également : Molière de la mise en scène, de l’Auteur francophone vivant pour ses deux spectacles enchantés, mêlant conte, histoire et magie : « Le Porteur d’Histoire » et « Le Cercle des illusionnistes », auquel s’ajoute le Molière de la révélation féminine pour Jeanne Arenes dans « Le Cercle des illusionnistes ».
Jolis seconds rôles
Toutes catégories confondues, on se félicite des deux Molières du seconds rôle : le « féminin » a récompensé la grande Isabelle Sadoyan, inénarrable mère indigne dans « L’Origine du monde » de Sébastien Thiéry mise en scène par Jean-Michel Ribes ; le masculin est revenu à Davy Sardou, impressionnant d’intensité et de maîtrise face à Francis Huster dans « l’Affrontement » de Bill C. Davis.
Côté comédies musicales, le délirant et hilarant « Crocodile trompeur/Didon et Enée » a eu raison de la super production « La Belle et la Bête ». Signalons enfin le Molière Seul en scène attribué à Grégory Gadebois pour « Des Fleurs pour Algernon ; et celui, fourre tout, de la meilleure création visuelle à « Tabac Rouge » de James Thierrée.
Le déroulement de cette cérémonie a eu ses hauts et ses bas, quelques longueurs (malgré la règle : une minute d’intervention pour les primés). Parmi les moments forts on notera les coups de gueule de Philippe Torreton, Valérie Dréville et Nicolas Bouchaud sur la réforme du régime des intermittents, l’émouvante ovation réservée à Michel Bouquet (Molière d’honneur) et l’hommage à Patrice Chéreau. Au chapitre « comique », Nicolas Bedos a fait quelques belles saillies, mais c’est une nouvelle fois Michel Fau _travesti of course_ qui a remporté la palme, avec ses poses et ses trémolos de divas. Il n’est pas sûr que le téléspectateur, vue l’heure tardive, soit allé jusqu’au bout de l’émission (et jusqu’à l’intervention surréaliste de Valérie Lemercier). C’est pour vous raconter tout cela qu’on était là…