Le Palacio egipcio de Medellin (Vidéo)

Construit il y a 85 ans, le Palacio Egipcio entame une seconde vie en tant que centre culturel underground en endossant un passé riche de mystères. Son créateur, un franc-maçon colombien, l’avait construit pour lancer un nouveau rituel égyptien dans son pays, mais aussi comme haut lieu de réunion de la franc-maçonnerie. Aujourd’hui, il fait partie d’un quartier devenu patrimoine culturel de la ville de Medellin : le barrio Prado.

Ses colonnes imposantes d’une dizaine de mètres, sculptées de hiéroglyphes, sont immanquables. Il faut monter sept grandes marches, symboles de l’ascension vers la spiritualité, avant d’atteindre la porte d’entrée du temple. L’intérieur abrite une cour faite d’autres colonnes, cette fois peintes de rose pâle et de bleu. L’œil égyptien trône partout, tout comme les représentations des dieux Osiris, Isis, Neftis ou Zed.

Le lieu a été construit en 1932 par Fernando Estrada. Le premier optométriste de la capitale Paisa avait confié le projet à l’architecte Nel Rodríguez. Il est connu de tous les habitants du quartier. Manuela Zuluaga, 22 ans, admire ce temple : « Je passais tout le temps devant et je me posais des questions sur ce lieu. C’est particulier pour Medellin, car c’est une partie du patrimoine culturel de la ville. Ce quartier a sans cesse influencé l’art. Il y en a toujours eu. Ce temple en fait partie. »

Un lieu franc-maçon

Mais, nul ne sait le but de ce temple. Fut-il une maison familiale pour Fernando, sa femme et ses 14 enfants, un temple égyptien pour lancer une nouvelle religion, ou un lieu de réunion des francs-maçons ?

Alberto Araque Montoya, le directeur de la fondation « Vision Planeta Azul » et propriétaire des lieux, est convaincu de la force franc-maçonne qui habite ce temple : « C’est l’unique palais égyptien au monde construit en dehors de l’Egypte. C’est le mélange de la culture égyptienne et des rituels égyptiens de la franc-maçonnerie. Il a donc été un temple franc-maçon. D’ailleurs, le fondateur en était. On sait que des décisions importantes ont été prises ici. Je ne suis pas franc-maçon même si j’ai des amis qui en font partie. Mais, les habitants et acteurs importants du quartier Prado le disent : ” bon ou mauvais “, le Palacio Egipcio est le symbole du quartier. Certains affirment : “ Si le palais va bien, le quartier va bien ” ».

Un reflet des rites égyptiens

« Il existe deux types de temples égyptiens : l’un consacré au culte du pharaon, et l’autre dédié à la connaissance. Ce temple sert à la connaissance. C’est le mariage des dieux Isis et Osiris. On a représenté le vagin d’Isis comme la matrice du pouvoir féminin. On retrouve également le pénis d’Osiris, raconte Alberto Araque Montoya. On a la galerie de la vie et celle de la mort. Tout a un sens, même la disposition des colonnes. Mais la question est : comment un savoir vieux de 5000 ans avant Jésus-Christ a été construit au XXe siècle ? C’est un mystère. »

Alberto Araque Montoya va encore plus loin dans l’analyse. Lors de ses recherches, il a découvert un contexte religieux complexe. « A sa construction, il y avait un temple catholique. L’arrivée de celui-ci, égyptien, a créé une concurrence recherchée par Fernando. Le propriétaire voulait lancer un nouveau mouvement et sortir de la tradition religieuse catholique. A l’époque, les francs-maçons étaient les fondateurs de l’économie et de l’industrie de Medellin. »

Cette rivalité a alors donné naissance à des légendes. « Ma mère me disait qu’on appelait ce temple “la maison du diable “. Celui qui passait devant était excommunié, celui qui passait de l’autre côté du trottoir devait aller se confesser. A l’époque, on passait en courant devant le palais. Chaque deuxième jeudi du mois, les francs-maçons s’y réunissaient. Les gens restaient dans le coin pour observer les démons (les francs-maçons) y entrer avec Lucifer. Beaucoup ont grandi avec ces idées ».

Promoteur de la liberté de conscience

Le directeur du temple veut être « un promoteur de la liberté de conscience ». Ainsi, le temple accueille des pièces de théâtre, des soirées électro, techno ou chrétiennes, des festivals de danse arabe ou des manifestations pour la gaypride ou des séminaires sur la marijuana médicinale.

« Pour atteindre la liberté de conscience, il faut deux choses: sentir avec le cœur et penser avec la raison. Le lien entre les deux : c’est la parole », explique le directeur du temple. La nouvelle raison de vivre du Palacio Egipcio bientôt inscrit dans les circuits culturels et touristiques de Medellin.

 

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